Betty Tompkins : The Women in My Life, cat. expo., 800 Gallery, West Long Branch (octobre 1997), Long Island City, Low-Tech Press, 1997
→Herbert Martin, Tompkins Betty, Fuck Paintings Etc., New York, Dashwood Books, 2011
Betty Tompkins, Paintings and Works on Paper, 1972-2013, Gavlak Palm Beach, Palm Beach, 21 décembre 2013 – 25 janvier 2014
→Betty Tompkins : WOMEN Words, Phrases, and Stories, The Flag Art Foundation, New York, 20 janvier – 14 mai 2016
Peintre états-unienne.
L’histoire de Betty Tompkins est un des exemples édifiant des mécanismes d’exclusion et de répression des femmes artistes dans l’histoire contemporaine. Entre 1969 et 1974, à New York, elle réalise une série, Fuck Paintings, des peintures photoréalistes de très grand format, en noir et blanc purs. Ces scènes de pornographie hétérosexuelle sont créées à partir d’images de sexe en gros plan, passées en contrebande et rapportées de Thaïlande par son mari. En 1973, invitée à exposer à Paris par le commissaire priseur Guy Loudmer, elle voit ses œuvres immédiatement saisies par les douaniers, acte de censure qui débouche sur une longue bataille juridique et la disparition des tableaux jusqu’en 2002, date à laquelle ceux-ci seront enfin montrés par le marchand Mitchell Algus à New York, puis à la Biennale de Lyon en 2003, en dialogue avec l’œuvre de Steven Parrino. À l’exception du Centre national d’art et de culture du Centre Georges-Pompidou, qui a acheté une des toiles censurées, l’œuvre de B. Tompkins, redécouverte par une nouvelle génération d’artistes comme Trisha Donnelly ou de critiques comme Bob Nickas, continue de faire l’objet d’un rejet des institutions internationales et des collections historiques liées à la mouvance de l’hyperréalisme. Il est pourtant indéniable que l’acte sexuel, dans toute sa crudité, fait partie des sujets de l’art hyperréaliste, au même titre que les surfaces brillantes, les animaux et les paysages sublimés, les gros plans de cinéma, de télévision, et tout ce qui se prête à une reformulation des notions d’intériorité et d’extériorité.
Gerhard Richter comme Richard Artschwager (The Fucking Paintings) se servent, eux aussi, d’images pornographiques, non admises dans la culture de masse et soumises à la censure, sans pour autant avoir été véritablement inquiétés et exclus de la scène internationale. Seule femme dans un mouvement dominé par les figures masculines, B. Tompkins a su tirer parti autrement de cet isolement, et produire récemment des séries de représentations sexuelles (dessins et peintures) frappées, obstruées par les mots du sexe et de l’interdit. Si son œuvre, au croisement de l’art conceptuel, du photoréalisme et de l’art engagé, ne peut être strictement associée aux mouvements féministes américains, elle tient néanmoins une place unique de résistance, et ses grandes surfaces pornographiques, qui réclament une véritable distance, frappent encore plus fort aujourd’hui par leur impact visuel, leur radicalité, leur puissance critique et réfléchissante.