Geldeman, Mordechai, In The Silver Mirror / Bianca Eshel-Gershuni: Select Works, Ha’kibbutz Ha’Meuhad publishing, 2007
→Geldeman, Mordechai, Heller, Sorin and Omer, Mordechai, Bianca Eshel-Gershuni / Step by Step, Tel Aviv Museum of Art, Tel Aviv, 2001
Step by Step, Tel Aviv Museum of Art, Tel Aviv, mars – juin 2001
→Bianka Eshel-Gershuni 1980-1985, Tel Aviv Museum of Art, Tel Aviv, mars – mai 1985
→Bianca Eshel-Gershuni: Jewelry, Musée d’Israël, Jérusalem, février – avril 1977
Sculptrice, peintre et créatrice de bijoux israélienne.
La pratique extrêmement variée de Bianca Eshel-Gershuni aborde à la fois les domaines de la sculpture, de la peinture, de l’assemblage et des objets miniatures, ainsi que la céramique et la bijouterie, tous liés par une esthétique luxueuse faite d’un assemblage de matériaux tout aussi haut de gamme que modestes, pour un résultat frisant le baroque, le kitsch et l’esthétique camp. Ce choix stylistique, couplé à son approche biographique et féministe, est unique dans le contexte de l’art conceptuel et minimaliste en Israël dans les années 1970 et 1980.
Après des études de sculpture et de peinture à l’Institut Avni d’art et de design de Tel Aviv dans les années 1960, B. Eshel-Gershuni se lance dans la création de bijoux, en dépit de toute formation officielle dans ce domaine – signe précoce d’une démarche farouchement indépendante. Ses bijoux excentriques, qu’elle nomme « fétiches » ou « bijoux impossibles », allient des matériaux précieux tels que l’or, l’argent, les perles et le jade à des matières ordinaires telles que le plâtre, le goudron, et de petits objets quelconques, notamment des petits jouets en plastique. Bien que ces pièces soient issues d’une approche sculpturale et présentent une esthétique, des tailles et des structures peu orthodoxes, elles rencontrent néanmoins un grand succès lors de son exposition individuelle Bianca Eshel-Gershuni: Jewellery (Musée d’Israël, Jérusalem) en 1977 et valent à l’artiste de nombreux prix.
Une autre exposition individuelle plus tardive, Bianca Eshel-Gershuni 1980-1985 (musée d’Art de Tel Aviv, 1985), reflète le glissement de sa pratique vers la sculpture et la peinture. Comme pour ses bijoux, ces œuvres font usage de matériaux de récupération tels que les fleurs artificielles, la fausse fourrure ou les plumes, et évoquent l’occurrence d’un événement explosif, dramatique ou païen. Les motifs orthodoxes orientaux et chrétiens, notamment celui de la croix, se répètent dans son œuvre et dénotent son intérêt pour les rituels religieux de mort et de renaissance, ainsi que pour les questions de genre, de féminité, d’intimité, de fertilité et de maternité, comme l’illustre une série de tableaux des années 1980 qui représente des femmes crucifiées.
L’autre motif récurrent chez B. Eshel-Gershuni est celui de la tortue, qui peut être vue comme un symbole de la femme portant sur son dos le poids de son foyer ou comme une représentation de l’introspection et de l’isolement. De fait, l’œuvre de B. Eshel-Gershuni, qui comprend de nombreux autoportraits, est chargée d’éléments autobiographiques. Son art peut être envisagé sous l’angle d’une mythologie personnelle qui reflète l’entremêlement de sa vie et de son art : en effet, son second époux est le célèbre artiste Moshe Gershuni (1936-2017) et leurs deux fils Aram (1967-) et Uri (1970-) Gershuni deviennent à leur tour des artistes reconnus. À cet égard, on considère que deux traumatismes majeurs ont influencé l’œuvre de B. Eshel-Gershuni : la mort de son premier époux dans un crash aérien en 1956 pendant la crise du canal de Suez, puis sa rupture avec son second mari qui venait de lui révéler son homosexualité.
Vers la fin de sa vie, lorsque son corps affaibli l’empêche de poursuivre sa pratique, B. Eshel-Gershuni se tourne vers la peinture numérique. À l’aide de logiciels faciles d’utilisation, elle produit des œuvres à l’esthétique extrêmement sensible, colorée, mais sombre. Bien qu’elle ait bénéficié d’expositions individuelles dans plusieurs musées d’envergure et reçu un prix pour l’ensemble de sa carrière de la part du ministère de la culture israélien en 2009, elle reste quelque peu marginale tout au long de sa vie et est considérée comme une « artiste pour artistes ». Cependant, elle a eu une influence indéniable sur la scène artistique locale. Son approche singulière, féminine et autobiographique, son usage généreux et sans compromis d’un mélange de techniques, de matériaux et de couleurs, ainsi que son mariage postmoderniste de plusieurs disciplines font de B. Eshel-Gershuni une artiste visionnaire dont le rayonnement se fera ressentir dans les travaux des générations suivantes.
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