Atsuko Tanaka, « About Kameki and Nobuko Tsuchiura », in Tsuchiura Kameki House Editorial Committee (éd.), Tsuchiura Kameki House (édition bilingue japonais-anglais), Tokyo, Kajima Publishing Co., 2025, p. 78-89
→Atsuko Tanaka, « Nobu Tsuchiura: The First Female Architect in Japan », Frank Lloyd Wright Quarterly, vol. 32, no 2, printemps 2021
→Nobuko Ogawa et Atsuko Tanaka, Big Little Nobu Wright no deshi, Josei Kenchikuka Tsuchiura Nobuko [Big Little Nobu, disciple de Wright – Nobuko Tsuchiura, femme architecte], Tokyo, Domesu Publishers Inc., 2001 (en japonais uniquement)
Sixième exposition Nobuko Tsuchiura, galerie Kubota, Tokyo, 1993
→Deuxième exposition Nobuko Tsuchiura, galerie Miyuki, Tokyo, 1972
→Première exposition Nobuko Tsuchiura, galerie Akane, Tokyo, 1969
Première femme architecte au Japon, peintre d’art abstrait.
Née à Sendai (ou à Tokyo selon les sources), Nobuko Yoshino est la fille aînée de Sakuzo Yoshino, professeur de droit à l’Université impériale de Tokyo et théoricien de la démocratie de l’ère Taishō (1912-1926), et de son épouse Tamano Abe. Son prénom de naissance est Nobu, mais comme il était d’usage à l’époque de rajouter « ko » aux prénoms de jeunes filles, on l’appelait souvent Nobuko. Après avoir reçu une éducation dans des établissements réputés, comme l’école primaire Seishi (quartier de Hongō à Tokyo), puis le collège pour jeunes filles affilié à l’École normale féminine de Tokyo, elle s’inscrit à l’Athénée français pour apprendre le français. Elle a 21 ans quand elle fait la connaissance de Kameki Tsuchiura (1897-1996), alors étudiant en architecture à l’Université impériale de Tokyo, et l’épouse en 1922. N. Tsuchiura s’intéresse alors à l’architecture sous l’influence de son mari, qu’elle accompagne à Los Angeles en avril 1923, où il a été invité à rejoindre le cabinet d’architecture de l’Américain Frank Lloyd Wright (1867-1959).
À l’époque, F. L. Wright loge ses employés dans sa maison-atelier de West Hollywood. Sous la direction de William Smith, un des collaborateurs du bureau d’études de F. L. Wright, N. Tsuchiura se met à tracer des plans et suit pendant deux ans des cours par correspondance d’architecture et de dessin industriel, cursus qu’elle parvient à terminer avant de quitter les États-Unis.
Au début du printemps 1924, W. Smith et le couple Tsuchiura s’installent pour environ un an et demi sur l’immense domaine de Taliesin dans le Wisconsin, qui comprend la résidence de F. L. Wright, mais aussi son bureau d’études et une ferme. N. Tsuchiura travaille alors pour F. L. Wright, notamment à la coloration des plans en perspective ; elle l’aide aussi à classer sa collection d’estampes et d’objets d’art ancien japonais. F. L. Wright aime être accompagné de N. Tsuchiura en kimono quand il sort, lui accorde sa confiance et la surnomme affectueusement « Big Little Nobu », en référence à sa grande présence malgré sa petite taille.
En avril 1925, les quartiers résidentiels de F. L. Wright de la résidence de Taliesin sont détruits par un incendie, et le couple Tsuchiura participe à leur reconstruction. Ils quittent finalement Taliesin en octobre pour s’installer à Chicago, et décident de traverser les États-Unis en voiture avant de rentrer au pays.
De retour au Japon en janvier 1926, K. Tsuchiura retrouve immédiatement du travail chez Okura Doboku (Okura travaux publics, actuelle Taisei Corporation), et dessine aussi des maisons individuelles à son compte, projets auxquels N. Tsuchiura apporte sa collaboration. Citons notamment la résidence des Tanii (1929-1930), celle des Ōwaki (1930) et leur propre demeure de Gotanda (1931), qui sont clairement des réalisations conjointes.
Parmi les architectures conçues par N. Tsuchiura elle-même, citons la Demeure de petite ou moyenne taille des temps nouveaux (1929), dessinée en réponse à un concours de dessins d’architecture organisé par la revue Asahi Graph, où elle décroche une médaille d’argent en catégorie A. Le pavillon témoin grandeur nature est construit dans le « village de pavillons résidentiels Asahi » dans le parc Seijō, renommé pour l’occasion « Pavillon Asahi No. 7 ». Le nom de N. Tsuchiura apparaît dans des revues féminines ou dans la presse quotidienne, comme dans cet article de 1929 intitulé « Demeure rafraîchissante : échange avec Mme Nobu Tsuchiura, dessinatrice d’une maison-culture avec de grandes fenêtres ». N. Tsuchiura y met en avant ses grands principes pour la réalisation de maisons individuelles : 1) utilisation optimale de l’espace, 2) organisation efficace du logement, 3) propreté, 4) isolation parfaite contre le chaud et le froid.
Leur résidence de Kami-Ōsaki (1935) est une maison à ossature bois (filière sèche) qui combine des espaces qui s’interpénètrent, rappelant ceux de l’Hôtel impérial de F. L. Wright, et des éléments fonctionnels de l’architecture moderniste européenne. Internationale dans son apparence extérieure, elle garde une touche locale, par exemple avec de petits auvents au-dessus des fenêtres, pour tenir compte du climat japonais. Collaboration entre les deux époux, elle fait l’objet d’un article du journal Asahi où l’on peut lire : « Nobuko Tsuchiya avance dans sa carrière de femme architecte », « Nobuko est une ingénieure hors pair qui travaille aux côtés de son époux dans l’univers de l’architecture ». Cette résidence, classée « patrimoine culturel matériel » par la Ville de Tokyo en 1995, est transférée dans le quartier de Minami-Aoyama en 2024 après restauration.
En décembre 1934, K. Tsuchiura fonde le cabinet d’architecte qui porte son nom. Bien que N. Tsuchiura y soit responsable de toute la décoration d’intérieur, il est difficile pour elle de s’imposer dans le monde totalement masculin de l’architecture. En 1937, elle décide de s’en éloigner pour rejoindre le Ladies’ Camera Club, fondé par le photographe Yasuzō Nojima (1889-1964). Le recueil de photographies Nekka Iseki [Vestiges de la province de Rehe], fruit d’un voyage dans le nord-est de la Chine, publié en 1937 par Sagami Shobō, comprend des œuvres de N. Tsuchiura, à côté de celles de K. Tsuchiura et de Hideto Kishida (1899-1966).
Après la Seconde Guerre mondiale, N. Tsuchiura ne renoue pas avec l’architecture, préférant s’adonner à la peinture abstraite, art qu’elle exerce jusqu’au-delà de ses 90 ans. Elle participe chaque année aux expositions du collectif Shōjukai, qui rassemble les disciples de son maître Masaki Suematsu (1908-1997), et expose en solo à six reprises entre 1969 et 1993.