Pinot Roberto (dir.), Tania Bruguera : esercizio di resistenza, cat. expo., Franco Soffiantino Arte Contemporanea, Turin (27 novembre 2003 – 24 janvier 2004), Turin, Franco Soffiantino Arte Contemporanea, 2004
→Höller Silvia, Matt Gerald, Lucknow Dirk (dir.), Portraits, cat. expo., Kunsthalle zu Kiel (22 juillet – 17 septembre 2006), Cologne, König, 2006
→Scudero Domenico, Cippitelli Lucrezia (dir.), Tania Bruguera, Milan, Postmedia books, 2010
Portraits, Kunsthalle zu Kiel, Kiel, 22 juillet – 17 septembre 2006
→On the Political Imaginary, Neuberger Museum of Art, New-York, 28 janvier – 11 avril 2010
→Talking to Power / Hablándole al Poder, YBCA, San Francisco, 16 juin – 29 octobre 2017
Plasticienne cubaine.
Depuis le milieu des années 1980, Tania Bruguera développe une œuvre militante, qui s’essaie à repenser et à redéfinir le rôle de l’art au sein de la société. Dans ses différents travaux – performances, vidéos, objets, dessins, installations –, le corps constitue un support essentiel en tant « qu’espace social et politique ». Ainsi, dans ses premières œuvres, elle se met en scène, parfois de manière violente, comme dans El peso de la culpa (« Le poids de la faute », 1997) : nue, un animal mort autour de son cou, elle mange de la terre afin de renouer avec un rite pratiqué par les indigènes lors de l’invasion espagnole. À partir des années 2000, elle développe un projet majeur, la Catédra Arte de Conducta (« Centre d’étude de l’art du comportement »), un programme de recherche consacré à la performance, se déroulant à La Havane, dans sa maison de Tejadillo. À travers des discussions, des cours, des expositions, des conférences, des ateliers, cette « école » à visée internationale s’adresse à des étudiants, des artistes, des professionnels de l’art et des penseurs d’horizons variés qui s’intéressent à divers domaines du savoir, tels que l’anthropologie, la sociologie, le journalisme, les sciences politiques, les mathématiques, l’histoire, l’histoire de l’art. Par ce biais, Bruguera souhaite développer ses interrogations et donner une nouvelle direction à l’art cubain. Très attachée à sa terre natale, elle souhaite inscrire ses actions dans l’histoire de son pays, comme en témoigne Homenaje a Ana Mendieta, œuvre consacrée à Ana Mendieta. Sans pour autant être autobiographique, elle s’inspire du passé politique et culturel de son pays.
Pour que l’art puisse de facto jouer un rôle dans la société, la plasticienne sollicite une participation active du spectateur. Lors de son intervention au Centre Pompidou (IP détournement, 2011), elle s’est appropriée des œuvres issues de la collection vidéo du musée national d’Art moderne, en accord avec les artistes, et a invité le public à venir acquérir illégalement ces « œuvres » pirates pour la somme d’un euro, devenant alors complice du détournement opéré par l’artiste, qui l’érige ainsi en hors-la-loi. T. Bruguera rejette l’aspect esthétique du terme de « performance », auquel est préféré celui d’un « art du comportement », plus fidèle, selon elle, aux expériences proposées, qui reposent toutes sur la notion de partage. Par ailleurs, ses expérimentations ne sont relayées par aucune trace, écrite ou visuelle, ce qui renforce l’importance de la présence du public. La mémoire et l’échange oral seuls les documentent, ce qui entraîne des altérations possibles par rapport à la réalité. Très active sur la scène contemporaine, elle a réalisé des projets à l’occasion de plusieurs expositions internationales, dont la Documenta 9 de Kassel (2002) et la Biennale de Venise en 2001 et 2005, et dans de nombreuses institutions (Kunsthalle, Vienne, 2006 ; Fonds régional d’art contemporain de Lorraine, Metz, 2006). Le 30 décembre 2014, Bruguera est arrêtée après avoir voulu organiser une « prise de micro » sur la place de la Révolution à la Havane, afin de laisser s’exprimer la population cubaine quant au récent rapprochement entre les États-Unis et Cuba. Son passeport est confisqué et elle est depuis lors retenue sur son île natale.