Courtney Desiree Morris, « To Defend This Sunrise : Race, Place, and Creole Women’s Political Subjectivity on the Caribbean Coast of Nicaragua », thèse de doctorat, université du Texas à Austin, 2012, p. 115-210.
→Betty LaDuke, « June Beer : An Artist of New Nicaragua », in Africa Through the Eyes of Women Artists, Trenton, Africa World Press, 1991, p. 141-148.
→Betty LaDuke, « June Beer : Nicaraguan Artist », Sage, nos 2-3, 1986, p. 35-39.
→Betty LaDuke, « June Beer’s Story », Heresies, no 20, 1986, p. 54-57.
Homenaje a June Beer, exposition commissariée par Oliver Martínez-Kandt. Xe Biennale du Nicaragua, Palais national de la culture, Managua, février-mai 2016.
→Galerie de la Casa Fernando Gordillo, Managua, 1984.
→Festival caribéen des arts (CARIFESTA), Barbade, juillet-août 1981.
Peintre et poétesse nicaraguayenne.
Pionnière, peintre autodidacte, poétesse féministe et travailleuse culturelle révolutionnaire, June Beer est née dans une famille ouvrière noire. Élevée par sa mère célibataire, elle est la dernière de onze enfants et la seule de sa fratrie à aller à l’école, jusqu’au cours élémentaire. Malgré la brièveté de son passage par le système éducatif, elle est une lectrice avide, qui cultive dès son plus jeune âge un amour de la connaissance. Tout au long de sa vie, elle outrepasse le rôle racialisé et genré – celui d’une femme « respectable », en situation de domestique – historiquement assigné aux femmes noires dans la région caraïbe du Nicaragua.
En 1954, J. Beer confie son premier-né à sa mère et part chercher du travail à Los Angeles. Elle est d’abord employée dans un pressing avant de poser pour des artistes. Dans les écoles d’art où elle exerce, elle subit des avances non désirées et une constante exotisation. Malgré ces discriminations genrées et raciales, c’est cette courte carrière de modèle qui la conduit finalement à la peinture. Un soir, alors qu’elle pose à titre privé pour l’actrice et activiste afro-américaine Ruby Dee (1922-2014), elle ressent et exprime un profond désir de peindre. R. Dee lui fournit ses premiers pinceaux, et J. Beer commence ainsi immédiatement son premier tableau, un autoportrait nu. L’histoire de sa peinture débute donc par une quête d’elle-même, hors de tout regard extérieur. Elle ne cesse par la suite de méditer sur la subjectivité des femmes noires et caribéennes au Nicaragua, dans des portraits tendres et intenses qui constituent le sommet de son œuvre picturale.
Après son retour à Bluefields en 1956, J. Beer se marie avec un homme alcoolique, qui ne contribue pas aux dépenses du foyer ni ne soutient son travail artistique. Afin de subvenir aux besoins de leurs trois enfants, elle récupère des bouteilles et des récipients en plastique pour les revendre à des recycleurs de Managua, où elle achète des légumes qu’elle revend à Bluefields. À partir de 1969, elle se rend régulièrement à Managua pour y continuer sa carrière d’artiste. À mesure qu’elle fréquente les cercles artistiques révolutionnaires de la capitale, sa peinture traduit une conscience politique de plus en plus affûtée. Des tableaux et des poèmes comme Black Female Militant [Militante noire, 1981] et « Love Poem » [Poème d’amour, 1986] expriment le soutien de l’artiste à la révolution sandiniste, ainsi que le rôle essentiel qu’elle assigne aux communautés noires et autochtones de la côte caraïbe dans le processus révolutionnaire. Son œuvre critique alors directement l’évolution du projet sandiniste vers un virilisme ethnonationaliste.
Après le triomphe de la révolution en 1979, J. Beer est nommée directrice de la bibliothèque de Bluefields et collabore à la revue sandiniste Sunrise ; elle adhère également à l’association sandiniste des travailleurs culturels (ASTC). Avec le soutien de l’ASTC, son œuvre est présentée dans le cadre de plusieurs expositions nationales et internationales, notamment à la Barbade, en Espagne, au Mexique, au Costa Rica, à Cuba, en Allemagne, en Union soviétique, aux États-Unis, en Italie et au Japon. En 2016, la Biennale du Nicaragua lui rend hommage.
Une notice réalisée dans le cadre du programme « The Origin of Others » en partenariat avec le Clark Art Institute.
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