Ikemura Leiko, Doko nimo zokusanai watashi [Moi qui n’appartiens à aucun endroit], Tokyo, Heibon-sha, 2019
→Ikemura Leiko, Leiko Ikemura Caramic Sculptures and Related Works, Shizuoka, Vangi Sculpture Garden Museum, 2014
→Leiko Ikemura, Uminoko Drawings and Poetries by Leiko Ikemura, Tokyo, AKAAKA Art Publishing Inc, 2006
Leiko Ikemura : Our Planet- Earth & Stars, The National Art Center, Tokyo, 18 janvier-1er avril 2019
→Leiko Ikemura : Toward New Seas, Kunstmuseum Basel, 11 mai-1er septembre 2019
→Leiko Ikemura : Transfiguration, The National Museum of Modern Art, Tokyo, 23 août-23 octobre 201/Mie Prefectural Art Museum, 8 novembre 2011-22 janvier 2012
Artiste visuelle japonaise.
Après des études d’espagnol à l’Université des langues étrangères d’Osaka, Leiko Ikemura quitte le Japon pour l’Espagne en 1972. Inscrite à l’Académie des beaux-arts de Séville de 1973 à 1978, elle y acquiert ses premières connaissances artistiques. En 1979, elle entame sa carrière de peintre alors qu’elle s’est installée à Zurich, en Suisse, avant de déménager dès 1983 en Allemagne, suite à l’obtention d’une résidence d’artiste offerte par la ville de Nuremberg. En 1985, elle s’établit à Cologne. Quand on lui propose, en 1991, d’enseigner à l’Université des arts de Berlin – poste qu’elle assurera jusqu’en 2015 –, elle partage sa vie professionnelle entre les deux villes. Depuis 2014, elle est également professeure invitée à l’Université des arts pour jeunes filles (Joshibi) de Tokyo. En 2020, elle est récompensée par le Prix d’encouragement artistique, décerné par le ministère japonais de l’Éducation, de la Culture et des Sciences.
C’est donc à son installation en Europe que L. Ikemura étudie l’art et embrasse une carrière d’artiste. Les peintures grand format et les nombreux dessins de ses débuts, marqués par le néo-expressionnisme qui domine largement la scène européenne des années 1980, reçoivent certes une critique élogieuse mais, rapidement, L. Ikemura refuse de se laisser emporter par de telles tendances qui risquent de l’engloutir totalement. Elle choisit plutôt de mettre en avant sa singularité en tant que femme asiatique, qui se matérialise en 1989 par la série Indiens des Alpes, réalisée lors d’un séjour au cœur des montagnes suisses, où elle s’est réfugiée. Son style évolue encore dans les années 1980, avec des installations combinant des petits formats représentant des fillettes dont les contours semblent se fondre dans des arrière-plans monochromes jaunes, bleus ou noirs et des figurines creuses en terre cuite, parfois sans visage. La figure féminine de L. Ikemura est celle d’une étrangère, dans une représentation qui reflète sa propre situation de femme artiste, avec toute l’ambiguïté et l’instabilité que cela suppose, mais en aucun cas il ne s’agit d’un être fragile ou faible. C’est plutôt une présence immatérielle, libre, se tenant tantôt debout avec un chat dans les bras, tantôt allongée sur le sol, tantôt flottant dans les airs. Le vide qu’on aperçoit dans les figurines creuses allongées suggère non pas le néant, mais un esprit libre et fluide.
Puis L. Ikemura entreprend de peindre des horizons sans personnages (Océan II, 2000-2001), ou bien dans lesquels apparaît une multitude de figures féminines tels des esprits aériens (Océan III, 2000-2001). L’horizon marin se transforme parfois en bataille navale (Rouge Pacifique, 2006), comme une discrète mise en garde contre notre monde où les guerres ne cessent jamais. Plus récemment, la nature et l’humain fusionnent littéralement pour communier en une expression grandiose, aussi bien dans sa peinture (Paysage maternel, 2011-2015) que dans sa sculpture (Visage du Fuji, 2013). Cette veine se prolonge dans une série de paysages transcendant l’espace et le temps, inspirés de la peinture traditionnelle orientale sansuiga (de Zarathoustra, 2014 à Ondes printanières, 2018).
Profondément marquée par le puissant séisme qui touche le nord-est du Japon en 2011, L. Ikemura entame une nouvelle création en volume, Usagi Kannon [Déesse-lapin de la miséricorde, 2012-2014], sculpture protectrice qui recueille les prières : si l’original est réalisé initialement en terre cuite, les versions ultérieures sont coulées en bronze. Confinée pendant la pandémie de covid-19 qui frappe le monde entier, L. Ikemura s’intéresse au verre, matériau qu’elle peut façonner dans l’atelier attenant à son domicile, pour s’approprier un nouveau mode d’expression. Artiste féconde, elle est également connue pour sa photographie et ses publications de poèmes ou d’essais – une multiplicité de procédés qui se répondent les uns les autres pour traduire ses profondes réflexions et son regard critique sur le monde.
Une notice réalisée dans le cadre du programme « Artistes femmes au Japon : XIXème – XXIème siècle »
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