Cotter, Suzanne (dir.), Nairy Baghramian: cold shoulder, cat. expo., Museu de Arte Contemporânea de Serralves, Porto (2014), Porto, Fundação de Serralves, 2014
→Germann Martin (dir.), Déformation professionnelle: Nairy Baghramian, cat. expo., Walker Art Center, Minneapolis (2017), Munich, Prestel, 2017
It is not at home, Kunsthalle Basel, Bâle, 2006
→Retainer, Sculpture Center, Long Island City, New York, 2013
→Déformation Professionnelle, Museum der Moderne, Salzbourg ; Walker Art Center, Minneapolis, 2017
Plasticienne iranienne-allemande.
Au milieu des années 1980, Nairy Baghramian, accompagnée de sa famille, fuit l’Iran pour des raisons politiques et s’installe à Berlin où elle vit encore aujourd’hui. Après une formation universitaire qu’elle a voulue éclectique et dense en l’histoire de l’art, arts visuels, théâtre, cinéma, danse et architecture, à l’Universität der Künste et à la Freie Universität de Berlin et au Goldsmiths College à Londres, elle s’engage dans une pratique artistique au tournant des années 2000.
Rapidement, la sculpture s’impose comme un médium de prédilection dont l’artiste n’a alors de cesse de questionner le statut – composition, mise en espace et rencontre avec le public – pour en réinventer les formes, en étendre les possibilités et en renouveler les enjeux. En revisitant les concepts traditionnels, elle imagine un vocabulaire novateur qui emprunte à la fois aux arts visuels, aux arts vivants et aux arts décoratifs. En effet, elle s’inspire aussi bien de l’histoire de la sculpture, et tout particulièrement de la statuaire classique, des mouvements modernistes d’avant-garde et de l’art minimal que du théâtre, de la danse et de la performance ou encore du design, de l’artisanat et de la mode. Portées par une réflexion plurielle, ses expérimentations donnent naissance à des assemblages inédits qui procèdent par rencontre, par croisement et par frottement, de matières, de textures et de couleurs. Molles ou rigides, douces ou rugueuses, manufacturées ou façonnées manuellement, uniques ou organisées en série, les œuvres de N. Baghramian se jouent des apparences et des contradictions. Alors qu’elles semblent sur le point de s’écrouler, de se déliter ou de se briser, leur supposée fragilité se voit contredite par les matériaux utilisés.
Emblématique, Retainer (2012) est une installation circulaire composée d’un ensemble de plaques de silicium coulé aux contours indéfinis, fixées sur une armature de barres métalliques, tels des lambeaux de chair exhibés sur des broches orthopédiques. Plus récemment, dans la série Maintainers (2018), des volumes colorés d’amplitudes différentes sont fortement maintenus entre eux par les mâchoires d’un étau. Qu’il s’agisse de morceaux de corps, de protubérances et cavités qui évoquent la physiologie humaine, mais aussi d’éléments d’architecture, de mobilier et de décoration intérieure, ou d’objets agrandis et détournés, ou encore de prothèses futuristes et de carapaces animales, l’artiste développe une pluralité de formes hybrides étrangement familières qui semblent émaner les unes des autres. Disposées au sol, au mur ou au plafond, dans l’embrasure d’une porte, sur une colonne ou sur un toit, se déployant seules ou en nombre, dans la hauteur ou dans la largeur, en intérieur ou en extérieur, ses sculptures abstraites, parfois monumentales, reconfigurent le lieu d’exposition avec lequel elles entretiennent un dialogue étroit. Impulsée par les données architecturales, leur mise en situation correspond à un dispositif quasi chorégraphique dont le mouvement va également influer sur la déambulation du spectateur ou de la spectatrice, à l’instar de ce que l’on observe dans French Curve (2014), courbe aux allures de mue reptilienne qui se répand au sol. Considérant l’espace comme un prolongement de ses sculptures, N. Baghramian n’hésite pas à les questionner et à les réinterpréter en fonction du contexte de présentation, faisant de son œuvre protéiforme un organisme malléable et vivant.
N. Baghramian bénéficie d’une reconnaissance majeure sur la scène artistique internationale, en témoignent sa présence dans des collections publiques et privées de premier plan, ses nombreuses expositions muséales et sa participation à des manifestations importantes telles que la Biennale de Venise (2011 et 2019), la documenta de Cassel (2017) ou le Skulptur Projekt de Münster (2007 et 2017).