Nathalie Leroy Fiévée — Résonance des contrastes, cat. exp., CAC de la Matmut, Saint-Pierre-de-Varengeville (3 octobre 2015 – 3 janvier 2016), Paris, Carpentier, 2015
→Latitudes, terre d’Amazonie, cat. exp., hôtel de ville de Paris, Paris (15 décembre 2006 – 27 février 2007), Paris, OCEA, 2006
→Dobbels, Daniel, Nathalie Leroy Fiévée, Nîmes, Conseil général du Gard, 2002
Des grains de poussière sur la mer. Sculpture contemporaine des Caraïbes françaises et d’Haïti, Little Haiti Cultural Center, Miami, 7 mars – 14 novembre 2020 ; 516 ARTS, Albuquerque, 19 juin –18 septembre 2021; San Francisco Art Institute, San Francisco, 18 novembre 2021 – 2 avril 2022 ; villa du Parc, Annemasse, 11 juin – 18 septembre 2022 ; Ferme du Buisson, Noisiel, 15 octobre 2022 — 29 janvier 2023 ; Fræme, Marseille, 2024 ; CAC Passerelle, Brest, 2024
→Latitudes, hôtel de ville, Paris, 2006 ; préfecture, Guyane, 2006 ; Centre culturel Tjibaou, Nouméa, 2007 ; 10e Biennale de La Havane, 2007 ; Contemporary Art Museum, Panama, 2007 ; pavillon de la Ville, Pointe-à-Pitre, 2007 ; École régionale des beaux-arts, Besançon, 2009
→Nathalie Leroy Fiévée. Tableaux et sérigraphies, galerie Jean Fournier, Paris, 19 octobre – 15 novembre 2000
Peintre guyanaise.
Née à Cayenne, Nathalie Leroy Fiévée entre en 1992 aux Beaux-Arts de Paris dans l’atelier de Claude Viallat (1936-), membre fondateur du groupe Supports/Surfaces. Elle en est diplômée en 1998 avec les félicitations du jury. C’est là qu’elle commence sa série à la gouache Origines (1996), qu’elle considère aujourd’hui comme l’essence de son travail : cette année-là, durant un voyage d’études aux États-Unis financé par la bourse Maurice Colin-Lefranc, N. Leroy Fiévée décide de partir à la rencontre des peuples autochtones de l’Arizona et du Nouveau-Mexique en compagnie de l’artiste navajo Joe Ben Junior (1958-). À son retour à Paris, c’est une peinture végétale qu’elle exalte, et qu’elle expose notamment à la galerie Jean Fournier au début des années 2000.
La mythologie et le processus de création propre à Origines sont tenus secrets par l’artiste. Cependant, on peut associer son répertoire iconographique à une catégorie esthétique que je qualifierais de « micro-animiste », suivant les formes de mondiation de l’anthropologue Philippe Descola. Ainsi, l’art ne serait pas une notion universelle qui s’appliquerait à toutes les communautés ; ces dernières se ségrèguent entre elles par différents modes d’identification (animisme, totémisme…) afin de composer des mondes indépendants dans lesquels s’ouvrent des images irréductibles aux visions occidentales. Pour autant, l’anthropologie de la série de N. Leroy Fiévée diverge de celles enregistrées par les ethnologues en raison des mutations de la culture visuelle post-esclavagiste, qui désintègrent les esthétiques « macro-animistes ». Il s’agirait donc de penser son œuvre à partir de la sécularisation du territoire colonisé (Mohamed Amer Meziane, Des Empires sous la terre. Histoire écologique et raciale de la sécularisation, 2021) telle que celle endurée dans les Guyanes ou plus généralement en Abya Yala : la christianisation des autochtones et des Africain·e·s transbordé·e·s, l’extinction d’expérience relationnelle, la déforestation et la naturalisation de ses paysages habités. Les bèt dan-bwa [bêtes/fées des bois] du folklore africain-guyanais qui peuplent la foresta dell’arte de l’artiste ont ici la difficile fonction de s’offrir comme pharmacie « micro-animiste » afin de ré-humuser cette terre et ses existants colonisés.
Artiste animiste, N. Leroy Fiévée n’exerce point une pratique de l’unique : elle décloisonne sa peinture des figurations de l’esthétique séculariste inhérente à l’art contemporain à partir de la notion de jardin qu’elle tourbillonne à la manière de Toni Morrison dans son roman Paradis (1998). Suivant ces turbulences, elle présente en 2022, pour l’exposition Des grains de poussière sur la mer à la Ferme du Buisson, Ex voto : isi-a nwé blan blues [Ex voto : ici noir blanc blues 2018-2022], une installation incluant un poème endeuillé peint in situ dédié à Mamilusi, sa défunte grand-mère d’origine Kali’na, et au jardin de sa maison, dans laquelle l’artiste a été élevée.
Une notice réalisée dans le cadre du programme « The Origin of Others. Réécrire l’histoire de l’art des Amériques, du XIXe siècle à nos jours » en partenariat avec le Clark Art Institute.
© Archives of Women Artists, Research and Exhibitions, 2023