Barbara Rök, Ottilie W. Roederstein (1859–1937). Eine Künstlerin zwischen Tradition und Moderne. Monographie und Werkverzeichnis [Ottilie W. Roederstein (1859-1937). Une artiste entre tradition et modernité. Monographie et catalogue raisonné.], sous la direction de Eva Scheid pour le compte du Magistrat der Stadt Hofheim a. Ts. – Stadtmuseum / Stadtarchiv, à l’occasion de l’exposition éponyme, Marburg, Jonas Verlag, 1999
→Hermann Jughenn, « Ottilie W. Roederstein und ihr Werk » [Ottilie W. Roederstein et son travail], Hofheimer Chronik, édition II, 1963
→Clara Tobler, Ottilie W. Roederstein, Zurich/Leipzig/Stuttgart/Vienne, Rascher & Cie. A.-G., 1929
Ottilie W. Roederstein, Kunsthaus Zürich, 18 décembre 2020 – 5 avril 2021 ; Städel Museum, Francfort-sur-le-Main, 19 mai – 5 septembre 2021
→Ottilie W. Roederstein, 1859–1937. Eine Malerin in Hofheim, Rathaus et Haindlhof, Hofheim am Taunus., 2 – 23 novembre 1980
→Gedächtnis-Ausstellung O. W. Roederstein, Frankfurter Kunstverein, Francfort-sur-le-Main, 3 – 24 avril 1938
Peintre suisse-allemande.
Née dans une famille de commerçants allemands à Zurich en 1859, Ottilie W. Roederstein doit faire face aux réticences de ses parents, qui s’opposent à son désir de poursuivre une carrière de peintre. À l’âge de 17 ans, ils l’autorisent néanmoins à suivre des cours de peinture avec Eduard Pfyffer (1836-1899) à Zurich, puis avec le célèbre portraitiste Karl Gussow (1843-1907) à Berlin. En 1882, O. W. Roederstein s’installe à Paris, où elle parfait sa maîtrise du portrait et du nu – un domaine encore tabou chez les femmes artistes – à l’atelier non mixte de Carolus-Duran (1837-1917) et de Jean-Jacques Henner (1829-1905). Elle commence à exposer au Salon en 1883. Elle reçoit une médaille d’argent aux Expositions universelles de Paris en 1889 et 1900, notamment pour son tableau Miss Mosher (vers 1887). Elle retourne à Zurich en 1887 mais garde son atelier parisien jusqu’en 1914.
En 1891, O. W. Roederstein s’installe à Francfort-sur-le-Main avec sa compagne, la gynécologue munichoise Elisabeth H. Winterhalter. La peintre s’intègre rapidement à la vie de cette métropole conservatrice et, outre ses portraits, peint de plus en plus d’œuvres allégoriques et religieuses. Vers 1893, inspirée par ses recherches sur l’art de la Renaissance italienne et allemande, et encouragée par ses nouveaux confrères de Francfort, Karl von Pidoll zu Quintenbach (1847-1901) et Hans Thoma (1839-1924), O. W. Roederstein se met à peindre à la tempera. Cette technique, qui connaît un regain d’intérêt en Europe à la fin du XIXe siècle, est considérée à la fois comme traditionnelle et avant-gardiste. Elle ouvre la voie à une nouvelle esthétique linéaire et à un langage formel simplifié qui vont de pair avec une certaine conception idéaliste de l’art. Son Autoportrait à la casquette rouge (1894) est vu comme précurseur de ce changement de style.
O. W. Roederstein ne cesse de peindre des autoportraits tout au long de sa carrière : on n’en recense pas moins de quatre-vingts. Elle se représente le plus souvent de manière assurée, avec un regard sévère, et adopte des poses considérées à l’époque comme masculines, comme dans son Autoportrait aux bras croisés (1926). De ce fait, ses autoportraits peuvent être interprétés comme des preuves de son émancipation.
Vers 1900, O. W. Roederstein bénéficie déjà d’une solide réputation et se fait connaître à l’étranger. En 1912, elle est la seule artiste femme à représenter la Suisse lors de l’exposition précurseure de la Sonderbund à Cologne, aux côtés de ses collègues masculins, notamment Ferdinand Hodler (1853-1918). Une blessure à la main en 1901 l’empêche de peindre correctement en détail à la tempera, ce qui la pousse un temps à adopter la peinture à l’huile et une touche plus sommaire, tout en éclaircissant sa palette de couleurs.
En 1909, elle emménage avec E. Winterhalter à la campagne dans la ville de Hofheim am Taunus. O. W. Roederstein décrit les années qui suivent, au cours desquelles elle retrouve l’usage de la tempera, comme une période de recherche d’un style personnel. Elle alterne l’usage d’une touche très picturale et d’une accentuation prononcée des contours. Puis, dans les années 1920, elle s’oriente vers un langage visuel plus prosaïque et objectif.
O. W. Roederstein bénéficie d’expositions individuelles d’envergure à Zurich et à Francfort en 1925, 1929 et 1934, qui lui valent une grande reconnaissance et la remise de plusieurs distinctions. En plus de sa carrière de peintre, elle est également mécène et milite avec sa compagne pour l’éducation des femmes.
Bien qu’elle ait été considérée comme l’une des plus grandes portraitistes des débuts du modernisme, O. W. Roederstein tombe dans l’oubli après sa mort en 1937. Ce n’est qu’aujourd’hui que le public redécouvre son œuvre aux multiples facettes.