Anne Mwiti, « The Importance of Remembering Kenyan Artist Rosemary Karuga », The Conversation, février 2021
→Thelathini : 30 Faces, 30 Facets of Contemporary Art in Kenya, Nairobi, Kuona Trust, 2003.
→El Anatsui, Contemporary African Artists : Changing Tradition, cat. exp. (Studio Museum in Harlem, New York, janvier-mai 1990), New York, Studio Museum in Harlem, 1990.
Untitled, Red Hill Art Gallery, Nairobi, octobre-décembre 2017.
→Contemporary African Artists : Changing Tradition, Studio Museum in Harlem, New York, janvier-mai 1990.
→Collages et bruitages de Rosemary N. Karuga et Claudine Brahem-Drouet, 5e Festival international des Francophonies, Direction des Affaires Culturelles du Limousin, Limoges, octobre 1988.
Collagiste kényane.
Rosemary Namuli Karuga naît à Meru, au Kenya, d’un père ougandais et d’une mère kényane. Dans son enfance, ses talents sont rapidement remarqués par les sœurs de l’école primaire St. Theresa d’Eastleigh, à Nairobi. Ces dernières lui recommandent d’étudier à la prestigieuse école d’art de l’université Makerere, en Ouganda. En 1950, elle devient la première femme à étudier dans cette école, où elle laisse une marque indélébile après l’obtention de son diplôme en 1952. R. Karuga s’engage brièvement dans la voie de la publicité avant de retourner au Kenya, où elle choisit finalement d’enseigner les arts plastiques dans des écoles primaires. Ce choix freine le développement de sa propre pratique, et ce jusqu’à sa retraite en 1987, juste avant ses soixante ans. L’artiste participe cependant en 1965 à un workshop d’artistes organisé à Marangu en Tanzanie par Elimo Njau (1932) et sa Kibo Art Gallery.
R. Karuga connaît un regain de créativité à la fin des années 1980. En raison du coût exorbitant des matériaux qu’elle employait lorsqu’elle était étudiante, elle commence à explorer des médiums alternatifs. Elle découvre ainsi le potentiel du papier recyclé et crée à partir de cela de fascinants collages inspirés de l’art byzantin. Appréciant la vie rurale, R. Karuga dépeint des scènes pastorales et domestiques avec une grande minutie, réutilisant des matériaux d’emballage, des journaux et des pages de magazines anglophones, francophones et germanophones. En 1987, R. Karuga bénéficie d’une résidence artistique au Paa Ya Paa Arts Centre, fondé par E. et Rebeka Njau (1932) à Nairobi, ce qui attire une attention importante sur son œuvre. Elle participe également à une exposition collective, Women in Art in East Africa (1987), à Paa Ya Paa, puis elle devient l’une des artistes majeures de la galerie Watatu, qui présente ses collages dans la plupart des expositions qu’elle organise.
Son talent traverse les frontières lorsque, en 1988, elle reçoit de la part des metteurs en scène français, Gilles Zaepffel et Paule Kingleur, rencontrés à Paa Ya Paa, la commande d’une large série d’oeuvres illustrant L’Ivrogne dans la brousse (1952). Ces collages, ainsi que plusieurs « machines musicales » conçues par Claudine Brahem-Drouet, accompagnent les représentations de l’adaptation théâtrale du roman culte de l’auteur nigérian Amos Tutuola par le Théâtre Écarlate à Limoges lors du Festival international des Francophonies en 1988 et à Épinal, l’année suivante. Cette opportunité ne lui attire pas seulement une reconnaissance internationale, elle lui ouvre aussi les portes d’autres expositions dans les années 1990, dont Contemporary African Artists : Changing Tradition, une exposition collective du Studio Museum in Harlem, à New York, en 1990. Elle est la seule femme de cette sélection qui compte neuf brillants artistes africains.
La santé de R. Karuga décline lors d’une visite en Irlande en 2006, ce qui l’empêche de retourner au Kenya. Malgré sa vue et son ouïe faiblissantes, elle persiste dans sa pratique artistique. Durant la période qu’elle passe en Irlande, elle reçoit le Lifetime Achievement Award de la part du African Voice Newspaper pour ses accomplissements et pour ses contributions à la société irlandaise : elle est la première femme d’Afrique de l’Est à recevoir cet honneur. De retour chez elle, elle est célébrée et présentée en 2017 comme la première « artiste du mois » dans le cadre d’un nouveau programme mené au Musée national du Kenya. Peu après a lieu sa première exposition individuelle à la Red Hill Gallery, à Nairobi, R. Karuga meurt en 2021 à Dublin. Ses collages font désormais partie des collections du Musée national du Kenya, des Archives nationales du Kenya, de Murumbi Trust’s African Heritage, de la Watatu Foundation, de la Circle Art Gallery et de la Red Hill Art Gallery.
Une notice réalisée dans le cadre du projet Tracer une décennie : artistes femmes des années 1960 en Afrique, en collaboration avec la Njabala Foundation
© Archives of Women Artists, Research and Exhibitions, 2023