Karen McNeill, « Julia Morgan. » dans Oxford Bibliographies Online: Architecture, Planning, and Preservation. Oxford University Press, 2024
→Gordon Fuglie, Julia Morgan: The Road to San Simeon, Visionary Architect of the California Renaissance, New York, Rizzoli Electa, 2022
→Victoria Kastner, Julia Morgan: An Intimate Biography of the Trailblazing Architect, San Francisco, Chronicle Books, 2021
Architecte états-unienne.
Julia Morgan a ouvert la voie aux femmes en architecture. Née à San Francisco, elle grandit à Oakland et obtient un diplôme d’ingénierie civile à l’University of California à Berkeley en 1894. Deux ans plus tard, elle embarque pour Paris, où elle devient la première femme diplômée en architecture de l’École des beaux-arts (1902). En 1904, elle est encore la première femme à obtenir sa licence d’architecture dans l’État de Californie. Près de quarante ans plus tard, et après plus de sept cents commandes, le comité des femmes de la Golden Gate International Exposition la distingue comme l’une des femmes les plus importantes de Californie. En 2014, J. Morgan devient, de manière posthume, la première lauréate féminine du plus grand honneur de l’American Institute of Architects : la médaille d’or.
J. Morgan est l’une des architectes les plus prolifiques de sa génération aux États-Unis. Elle conçoit des centaines d’édifices uniques : des dizaines d’écoles, des églises, des bâtiments industriels et commerciaux, et près de cent constructions pour des organisations féminines. Elle conçoit ses bâtiments de l’intérieur vers l’extérieur et se concentre d’abord sur la fonction de l’espace, avant de l’habiller du style (ou des styles) recherché(s) par sa clientèle. Cela donne lieu à une œuvre d’une grande diversité, depuis les bungalows protomodernistes de style « Bay Tradition », avec leurs toits de bardeaux marron, jusqu’à l’extravagant Hearst Castle, avec son mélange méditerranéen de styles néogrec, hispano-mauresque, gothique, byzantin et Renaissance.
Le séisme catastrophique de 1906 à San Francisco, suivi d’incendies, constitue un tournant dans la carrière de J. Morgan. La ville se trouve quasi submergée par les décombres et la cendre, mais trois de ses importants projets répartis à travers la Baie – le Greek Theater à UC Berkeley (1903) ainsi qu’un campanile (1904) et une bibliothèque (1905) au Mills College, à Oakland – sont restés intacts. Ils font alors figure d’exemples inégalés de constructions modernes en béton et assoient la réputation d’excellence de J. Morgan parmi ses pair·es architectes, ingénieurs et constructeurs. À partir de ce moment, son travail attire l’attention de la presse professionnelle.
Le succès de J. Morgan doit aussi beaucoup à un réseau étendu de femmes défenseuses de multiples causes sociales, culturelles et politiques. Le campanile du Mills College marque ainsi le début d’une relation de deux décennies avec cette institution pour femmes, et l’architecte a pour client institutionnel le plus important la Young Women’s Christian Association (YWCA) : en vingt ans, J. Morgan conçoit des dizaines de bâtiments pour cette association. Elle est aussi l’architecte en chef d’un programme national de construction lors de la Première Guerre mondiale. Parmi les chefs-d’œuvre conçus pour des organisations féminines, on compte l’Asilomar Conference Grounds à Pacific Grove (1913-1928), de style « Bay Tradition », les centres de la YWCA d’inspiration néo-Renaissance à Oakland (1915) et à Honolulu (1926), l’hôtel gothico-mauresque Berkeley City Club (1930) et la YWCA chinoise de San Francisco (1932).
La biographie de J. Morgan ne saurait être complète sans reconnaître l’importance de la famille Hearst. C’est Phoebe Hearst, riche philanthrope et mère du magnat des médias William Randolph Hearst, qui scelle la relation entre J. Morgan et la YWCA. En 1914, l’architecte réalise sa première commande majeure pour W. R. Heast, le bâtiment du journal Los Angeles Examiner, et, en 1919, elle entreprend son travail pour Hearst Castle, qui s’étend sur près de trois décennies. Parmi ses autres travaux de commande majeurs figurent un ensemble de maisons de plage de style néogéorgien à Santa Monica (années 1920), le Phoebe Hearst Memorial Gymnasium, de style néoclassique, à UC Berkeley (1926) ainsi que Wyntoon, un domaine familial de style bavarois dans le comté de Shasta (années 1930). J. Morgan prend sa retraite en 1947 et meurt dix ans plus tard, à l’âge de quatre-vingt-cinq ans.