Cet ouvrage fait suite à la tenue d’un colloque international pluridisciplinaire organisé les 19 et 20 septembre 2019 au Centre Pompidou et au musée d’Orsay, à Paris, en partenariat avec l’association AWARE (Archives of Women Artists, Research and Exhibitions). Intitulé Faire œuvre. La formation et la professionnalisation des artistes femmes aux XIXe et XXe siècles, le colloque entendait dresser un état actuel de la recherche sur l’accession des artistes femmes aux structures d’enseignement, en France et à l’étranger, qu’il s’agisse des ateliers, des académies privées ou des écoles publiques.
Comme pour de nombreuses artistes femmes, la formation artistique de Louise Bourgeois fut à la fois longue et sinueuse. Débutée dans l’atelier de réfection de tapisseries de ses parents, elle se poursuit dans les académies parisiennes au cours des années 1930, puis à New York dans les années 1940, alors que Bourgeois est la mère de trois petits garçons. Pour elle, ce temps long répond aussi à deux singularités qui lui sont propres. Sa formation est plus intellectuelle que plastique, marquée par des rapports étroits avec ses professeurs : c’est un parcours mental. De plus, elle est à la recherche d’un « style propre », soit d’une méthode, d’un processus qui soit le sien, ainsi que de son médium de prédilection. Ce n’est que dans les années 1940 à New York qu’elle exécute ses premières pièces sculptées, alors qu’elle est en exil et que les « fétiches » extra-occidentaux font l’objet d’une recrudescence d’intérêt dans les milieux artistiques, notamment surréalistes. Son passage à la sculpture et son abandon définitif de la peinture passent à mon sens par un dernier détour et une dernière formation : son expérience de la gravure à l’Atelier 17, alors à New York, de William Hayter en 1946-1947.