El-Din Mursi Saad (dir.), Gazbia Sirry : Lust for Color, Le Caire, American University in Cairo Press, 1998
→Okeke-Agulu, Chika, « Politics by Other Means : Two Egyptian Artists, Gazbia Sirry and Ghada Amer », NKA Journal of Contemporary African Art, hiver 2009, pp. 117-149.
→Winegar, Jessica, « Gazbia Sirry: The Search. Personal Papers », dans Creative Reckonings. The Politics of Art and Culture in Contemporary Egypt, Stanford, Stanford University Press, 2006
Gazbia Sirry, Modern Art Museum, Le Caire, 1953
→Ten Egyptian Women Artists over Half a Century, galerie de l’Union socialiste arabe, Le Caire, 1975
→Gazbia Sirry, Retrospective (1951-1984), Akhenaton Gallery, Le Caire, 1985
Peintre égyptienne.
Gazbia Sirry naît au Caire en 1925 dans une famille issue de l’aristocratie turque. Elle est élevée par deux femmes, sa mère, qui est veuve, et sa grand-mère divorcée. Diplômée en 1948 de l’Institut supérieur des beaux-arts pour jeunes filles (Le Caire), elle poursuit sa formation à Paris dans l’atelier de Marcel Gromaire (1951), puis à Rome (1952) et à Londres où elle obtient un postdiplôme de la Slade School of Fine Art (1955). Elle se rattache à ses débuts au Groupe de l’art moderne, qui argue que les moyens d’expression picturale occidentaux peuvent servir le développement d’un art égyptien moderne et authentique. Ainsi, les figures hiératiques cernées de noir, caractéristiques de ses tableaux des années 1950-1960, empruntent aussi bien aux peintures sépulcrales pharaoniques et à la tradition copte qu’à la technique de la lithographie. Ses nombreuses représentations de femmes et de personnes des milieux populaires participent de l’iconographie nationaliste et contribuent à la reconnaissance de G. Sirry dans les sphères officielles – elle multiplie alors les bourses d’État et expose majoritairement dans des lieux gouvernementaux. Cependant, G. Sirry entretient une relation complexe avec le régime nassérien qui détient son époux en prison.
Dans la seconde moitié des années 1960, le style de G. Sirry mute vers une figuration plus géométrique tendant vers l’abstraction. Plusieurs commentateurs et commentatrices considèrent que cette évolution fait suite à une résidence à Los Angeles (1965) lors de laquelle elle se familiarise avec l’expressionnisme abstrait, et y voient une corrélation avec la défaite de la guerre des Six-Jours (1967) qui heurte profondément l’identité collective égyptienne et marque la fin du rêve panarabe. La politique d’ouverture menée par Anouar al-Sadate dès 1970 accélère l’internationalisation de la carrière de G. Sirry. Son travail est alors fréquemment présenté dans un cadre diplomatique – voir notamment sa série d’expositions personnelles au Goethe-Institut du Caire de 1970 à 1987. En 1984 et 1985, elle vit en Tunisie. En 1993, elle séjourne au National Museum of Women in the Arts (Washington) et, en 1994-1995, participe à Forces of Change, la première exposition dédiée aux artistes femmes arabes dans une institution occidentale, malgré sa réticence à être catégorisée selon son genre. Consciente des inégalités entre les sexes mais sans ouvertement se dire féministe, G. Sirry s’oppose à la séparation des femmes et des hommes au sein du Syndicat des arts plastiques égyptien fondé en 1979, et démissionne en 1981 de son poste de professeure à la faculté des beaux-arts de Helwan et à l’Université américaine du Caire à la suite de la suppression des cours de modèle nu pour des raisons religieuses.
G. Sirry continue de peindre dans son grand âge, notamment des paysages et des scènes de rue à l’aquarelle – un médium qu’elle a toujours pratiqué. Âgée de 85 ans lors de la révolution de 2011, elle réalise une série de tableaux selon un mode de représentation de plus en plus minimal. Malgré un parcours international (Biennale de Venise en 1956, 1958 et 1984 ; Biennale de Sao Paulo en 1953 et 1963 ; Festival panafricain d’Alger en 1969 ; FESTAC 1977 à Lagos, etc.), G. Sirry reste méconnue à l’étranger. L’Égypte, en revanche, célèbre constamment une artiste qui, depuis son adhésion aux luttes anticoloniales et au coup d’État de 1952 jusqu’aux lendemains de la révolution de 2011, a réagi dans ses tableaux à l’histoire de son pays tout en contribuant à l’expression d’une modernité picturale égyptienne et arabe.