Amin, Alessandra, « Sex, Sectarianism, and Seraphim: Nudes As Partisans », Partisans of the Nude: An Arab Art Genre in an Era of Contest, 1920-1960, cat. expo., Wallach Art Gallery, New York, (6 octobre 2023-14 janvier 2024), New York, Columbia University Press, 2024
→Boullata, Kamal, « The World, the Self, and the Body: Pioneering Women in Palestinian Art », in Palestinian Art: 1850-2005, Londres, Saqi, 2009
→Khal, Helen, « Juliana Seraphim », in The Woman Artist in Lebanon, Beyrouth, Institute for Women’s Studies in the Arab World, 1987
Juliana Seraphim: 1960 to 1991, Galerie Station des Arts, Beyrouth, janvier-février 1992
→Juliana Seraphim: Paintings and Drawings, Galerie Bekhazi (GAB Center), Beyrouth, avril-mai 1980
→Juliana Seraphim: Recent Works, Galerie Art-3, Paris, mai 1979
Peintre et dessinatrice libano-palestinienne.
Juliana Seraphim naît dans la ville portuaire de Jaffa, en Palestine, avant que la Nakba de 1947-1948 ne force sa famille à s’exiler au Liban. Pendant les années 1950, les membres de la famille Seraphim acquièrent la nationalité libanaise à la faveur des mesures discriminatoires du gouvernement, qui n’accorde celle-ci qu’aux Palestinien·nes chrétien·nes. Ce privilège permet à J. Seraphim de se rendre à l’étranger et de représenter le Liban aux concours d’art internationaux, comme les biennales d’Alexandrie (1962), de Paris (1963) et de São Paulo (1965). Aujourd’hui, elle est considérée, la plupart du temps, comme une artiste libanaise. Pourtant, si son statut lui a permis de s’intégrer à l’effervescente scène artistique nationale, à la différence de ses pair·es musulman·es, elle n’hésite pas à souligner l’impact qu’a eu son enfance palestinienne sur sa pratique artistique. Les heures passées en bord de mer à Jaffa ont instillé chez elle une fascination pour le monde marin, que l’on retrouve par exemple dans son exposition individuelle Espaces marins au Centre d’Art2 de Beyrouth en 1974. De même, son grand-père, architecte à Jérusalem, vivait dans un ancien couvent, et les vestiges de fresques qu’elle y a observés lui ont inspiré des mondes mystiques auxquels elle donne vie dans ses œuvres débordantes d’imagination.
J. Seraphim est une enfant sensible et introspective, et c’est donc tout naturellement qu’elle s’oriente vers les arts plastiques à l’âge adulte, afin de trouver un exutoire à ses profondes émotions. Tout au long de sa carrière, elle insiste sur le fait que son art puise dans son subconscient et qu’il exprime des sentiments et des souvenirs apparus involontairement. De ce fait, et de par la teneur fantastique de ses tableaux, son œuvre a souvent été qualifiée de « surréaliste ». Cependant, l’artiste ne se réclame d’aucun genre particulier, bien qu’elle ait admis avoir été fascinée par l’œuvre des surréalistes européen·nes lors de ses études aux Beaux-Arts de Florence (1959-1960), Madrid (1960-1961) et Paris (1965-1967).
Suite à sa première exposition, au Salon d’automne du musée Sursock de Beyrouth en 1961, J. Seraphim devient une figure de la scène artistique de la capitale. Bien qu’elle ait quitté Beyrouth pour Paris au milieu des années 1970, elle y revient fréquemment pour de longs séjours et partage son temps entre ses deux pays adoptifs, avant de s’installer finalement dans la ville de Jounieh en 1987.
Au cours de ses quarante années de carrière, J. Seraphim se distingue par son rejet des injonctions de genre, que ce soit dans son art ou dans sa vie. Elle refuse de se marier car elle considère que l’attention consacrée à un conjoint ou à des enfants va à l’encontre de sa vocation d’artiste, et met à l’honneur la sexualité dans de nombreux travaux. Ayant une production prolifique, elle est également connue pour son usage de l’encre noire – comme dans sa série de gravures inspirée du prix Nobel de littérature (1971) ou son œuvre Jardin (1965) – et pour ses peintures à l’huile richement colorées, faisant la part belle aux tons de rose bonbon, bleu-vert et autres teintes insolites. Son œuvre, comme l’illustre le tableau Untitled (1980), met invariablement en scène des figures féminines se transformant en fleurs, en papillons, en créatures marines ou autres formes issues de son imaginaire, qui lui permettent d’explorer avec finesse la confluence du féminin et du monstrueux.
Si J. Seraphim bénéficie d’un certain succès commercial de son vivant, son œuvre n’a cependant pas fait l’objet d’un intérêt critique. Cette tendance s’inverse néanmoins grâce à son inclusion dans deux expositions collectives majeures : l’exposition itinérante Beirut and the Golden Sixties: A Manifesto of Fragility au Gropius Bau, à Berlin (2022), la 16e Biennale de Lyon (2022) et au Mathaf, à Doha (2023) et Présences arabes – Art moderne et décolonisation – Paris 1908-1988 au musée d’Art moderne de Paris en 2024.
Une notice réalisée par AWARE : Archives of Women Artists, Research and Exhibitions, en partenartiat avec le The Beirut Museum of Art (BeMA).
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