Bryan-Wilson, Julia, « Maria Auxiliadora da Silva. Resitance and Survival: Revisiting the Brazilian Painter’s Capoeira », 4 Columns, 5 janvier 2020.
→Bardi, Pietro Maria, Fourny, Max, Maria Auxiliadora Da Silva, Turin, Colaffi, 1977.
Maria Auxiliadora: Vida cotidiana, Pintura e Resistência [Maria Auxiliadora : vie quotidienne, peinture et résistance], Museu de Arte de São Paulo Assis Chateaubriand, São Paulo, 10 mars – 3 juin 2018
Peintre brésilienne.
Pour beaucoup, Maria Auxiliadora da Silva représente aujourd’hui encore l’artiste afro-brésilienne par excellence, figurée dans ses nombreux autoportraits, tel Autorretrato com Anjos [Autoportrait aux anges, 1972]. Dans ses peintures, M. A. da Silva magnifie — et, pour certains, humanise — la vie quotidienne et la sociabilité (manifestations populaires, cultes liés aux religions afro-brésiliennes, etc.) des populations noires et pauvres du Brésil, notamment des quartiers de Brasilândia et de Casa Verde à São Paulo. Certaines de ses œuvres, comme Capoeira [1970], sont particulièrement appréciées pour leur représentation subtile de l’exode rural et du développement urbain au Brésil, du passage des espaces agricoles aux faubourgs. M. A. da Silva est aussi admirée pour son traitement de la figure féminine, sa représentation de l’amitié entre femmes et des relations de sororité, comme dans A Preparação das Meninas [Préparatifs de filles, 1972], où un groupe de femmes se prépare pour une soirée en ville. Pour M. A. da Silva, la peinture est bien plus qu’un élément pictural ; c’est avant tout un matériau expressif.
M. A. da Silva grandit dans une très grande famille de dix-huit enfants, descendante de personnes esclavisées à Campo Belo dans l’État de Minas Gerais. Dès sa plus tendre enfance, l’art fait partie de son quotidien grâce aux talents de peintre, de sculptrice et de brodeuse de sa mère, Maria Trindade de Almeida Silva. Plusieurs membres de sa famille deviendront d’ailleurs peintres, créateurs ou créatrices. M. A. da Silva n’accède qu’à peu d’instruction dans sa jeunesse du fait des obstacles sociaux liés à la race, au genre et à la classe et travaille comme femme de ménage pour subvenir aux besoins de sa famille tout en continuant à peindre en autodidacte.
M. A. da Silva s’installe à São Paulo, où elle expose ses œuvres Praça da República, une place du centre-ville, et dans des marchés aux puces en plein air à Embu das Artes avec la communauté artistique qu’elle s’est trouvée. C’est là qu’elle rencontre des intellectuels blancs d’ascendance européenne qui commencent à qualifier son travail d’« art populaire brésilien » et le présentent comme tel au public occidental. En 1971, son œuvre est exposée dans des foires et expositions à Bâle, Düsseldorf et Paris et M. A. da Silva se met à peindre à plein temps. De 1972 à 1974, ses peintures font constamment référence à la mort, allusion au cancer qui l’emportera en 1974.
En 1973, M. A. da Silva expose pour la première fois au MASP (musée d’Art de São Paulo) dans le cadre de l’exposition collective Exposição Afro-Brasileira de Artes Plásticas, organisée par Pietro Maria Bardi, le fondateur du musée. L’exposition suscite la controverse en raison de son approche et de son traitement de certaines œuvres présentées. En 1981, M. A. da Silva fait l’objet d’une exposition posthume au MASP. Le musée présente alors en 2018 Maria Auxiliadora: Vida cotidiana, Pintura e Resistência [Maria Auxiliadora : vie quotidienne, peinture et résistance], qui cherche à resituer l’œuvre de l’artiste de manière critique. Ainsi, depuis son entrée dans les grands circuits artistiques, on dit des réalisations de M. A. da Silva qu’elles font preuve de ce que les critiques qualifient de « spontanéité », d’« ingénuité », de « naïveté » ; or, cette catégorisation, au Brésil et plus globalement dans les Suds, désigne des œuvres attribuées à des artistes (femmes et hommes) autodidactes noirs et autochtones dans un contexte (post-)colonial qui les empêche, de manière systémique, d’accéder à un enseignement académique de l’art.
Une notice réalisée dans le cadre du programme « The Origin of Others. Réécrire l’histoire de l’art des Amériques, du XIXe siècle à nos jours » en partenariat avec le Clark Art Institute.
© Archives of Women Artists, Research and Exhibitions, 2022