Lowder, Rose, Rose par Rose Lowder, (edition numérique intéractive), Paris, Light Cone Éditions, 2015
→Lowder, Rose, « Des Archives du film expérimental », 1895. Mille huit cent quatre-vingt-quinze [En ligne], 41 | 2003, mis en ligne le 28 novembre 2007
→Lowder, Rose, Sudre, Alain-Alcide (dir.), l’Image en mouvement. 25 ans d’activité pour la défense du cinéma comme art visuel, Avignon, Archives du film expérimental d’Avignon, 2002.
Cinéaste en son jardin, programme de projections, Cinéma du réel, Paris, 2021
→Rose Lowder, Metabolic Rift Project, Kraftwerk, Berlin, septembre 25 – octobre 30, 2021
→Rose Lowder par Rose, projection et discussion, Centre Pompidou, Paris (France), 18 novembre 2015
Artiste et cinéaste expérimentale franco-péruvienne.
Reconnue dans le champ du cinéma expérimental, la pratique de Rose Lowder est également plastique. Pionnière d’une approche écologique globale et d’un usage singulier de la technique, R. Lowder a réalisé une cinquantaine de films. Elle vit à Avignon, où elle a cofondé les Archives du film expérimental, pour lesquelles elle est aussi programmatrice. Professeure associée à l’UFR d’arts plastiques à l’université Paris 1 depuis 1996, elle y enseigne jusqu’en 2005 l’histoire, la théorie et l’esthétique du cinéma expérimental.
R. Lowder est née à Lima au sein d’une famille qui l’encourage à suivre une formation artistique. C’est ainsi qu’elle part pour Londres en 1960, où elle rejoint d’abord la Regent Street Polytechnic (1960-1962) puis la Chelsea School of Art (1962-1964), où elle suit des cours de sculpture, de peinture, de design et de dessin. À la fin de ses études, elle travaille comme monteuse à la télévision britannique. C’est au cours d’une projection qu’elle découvre l’image animée de Robert Breer (1926-2011). Elle comprend alors « qu’on pouvait faire des films en tant qu’artiste » (interview avec Scott MacDonald, Millenium Film Journal, no30-31, automne 1997). En 1972, elle rejoint son compagnon à Avignon. En parallèle de ses jobs alimentaires, elle commence à faire des films.
R. Lowder conçoit ses films image par image. Dans Les Tournesols (1982), l’artiste filme un champ de tournesols sans arrière-plan. Le film pourrait se donner comme un plan fixe, mais les fleurs en mouvement envahissent le champ en all-over. Sur sa caméra Bolex 16 mm mécanique, R. Lowder effectue des allers-retours et, sur les pellicules, elle n’enregistre pas de manière chronologique. Cela donne une image particulière : ce ne sont pas les images qui vibrent mais bien les tournesols, travaillés comme un motif. La cinéaste, attachée dans son processus à la répétition et à l’étude, poursuit cette même recherche dans ses Scènes de la vie française (1986) ou encore dans Impromptu (1989).
Sa série la plus connue, Bouquets, catalyse son étude de la compression, la composition, la couleur et le mouvement. Ces films d’une minute commencés en 1994 d’abord pour ne pas perdre ses fins de bobines constituent aujourd’hui quatre ensembles présentés en séries de dix : de 1 à 10 (1994-1995), de 11 à 20 (2001-2005), de 21 à 30 (2005-2009) et de 31 à 40 (2014-2022). R. Lowder y affine ce qu’elle appelle le filmage, processus qui consiste à tisser des images dans la caméra. Dans le passage d’une image à l’autre, elle fait varier les paramètres, donnant lieu à cette nature morte qui semble remuer de l’intérieur. Une ligne anime les Bouquets : chez R. Lowder, pas d’image écologique sans une approche écosystémique de la pratique artistique. Elle va de son respect des paysages qu’elle filme et de son choix des lieux et fermes écologiques où elle produit ses œuvres jusqu’à la prise en compte de la diffusion, qui respecte et préserve les savoir-faire artisanaux du cinéma. C’est aussi le cas dans Source de la Loire (2019-2021), contemplation lumineuse et fluide.
Une deuxième ligne axe sa pratique, qui concerne le rapport de soin particulier que l’artiste accorde aux objets techniques. R. Lowder envisage des modalités d’articulation concrètes entre technique et paysage, comme s’il ne pouvait y avoir d’image écologique sans pensée écologique de la technique. Sa fidélité à la Bolex 16 mm en témoigne. Mais c’est le cas dès son premier film, Loops (1976), expérimentation menée sans caméra, avec seulement un projecteur, une amorce et un feutre bleu. Elle y initie une exploration qui repose sur le médium en lui-même, dans sa technicité propre, en se laissant guider par ses mécanismes : les possibilités d’agencement d’images dans l’expérimentation avec la bande sont ainsi inhérentes à l’outil de projection, comme si tout y était déjà inscrit.
Enfin, la jouxtant et l’épaississant, l’image écologique de R. Lowder s’accompagne d’une rigoureuse notation. En même temps qu’elle filme, elle dessine ses images, aiguisant son encadrement mathématique de sa prise du paysage. Ses notes ont avant tout un usage technique, mais elles ont leurs propres qualités plastiques : devenues partitions, elles se lisent comme un code poétique.