Zoarinivo Razakaratrimo, connue sous le nom de Madame Zo, est une figure majeure de l’art contemporain malgache. Son processus créatif s’illustre par une quête incessante d’expérimentation du médium textile et de renouveau des formes ancestrales malgaches. Cela se reflète dans sa capacité à fabriquer ses propres métiers à tisser pour réaliser des formes et des volumes aux dimensions inédites. Son travail peut être lu comme une oralité tissée, où les motifs abstraits questionnent les problématiques environnementales et socio-politiques à Madagascar et évoquent ses paysages, totems, symboles et concepts spirituels et poétiques.

À l’aube de sa trentaine, Madame Zo quitte audacieusement une carrière de dessinatrice cartographe pour entamer en 1985 une formation professionnelle en tissage et teinturerie textile au Centre national de l’artisanat malagasy (CENAM). En 1990, elle crée Les Tisserandes, une entreprise de tissage artisanal qui, dix ans plus tard, évolue pour donner naissance à la marque textile Zo Artiss, spécialisée dans la création de textiles et objets de design. En 1996, le projet d’appui au développement de l’artisanat malgache (Creadeva) lui fait rencontrer l’artiste Joël Andrianomearisoa (né en 1977). Adaptant sa technique, elle multiplie les expérimentations et intègre de nouvelles matières dans son tissage. Sa matériauthèque s’enrichit alors d’une infinité d’éléments tels que l’éponge, le papier journal, les bandes magnétiques, les composants électroniques, le cuivre, les rebuts de plastique, les légumes, les plantes médicinales et autres matières organiques…

Au début des années 2000, Madame Zo fréquente le cercle des artistes contemporain·es malgaches Vondrona Andrafetana su Ivoizana ny Kolotsain’ny Ampitso (VAIKA) et prend part aux manifestations culturelles et artistiques locales. Sa carrière internationale est lancée en 2000 avec sa participation en tant que designer au Salon international du design africain et de la créativité textile, organisé dans le cadre de la troisième édition de la Biennale de Dakar, au Sénégal. En 2001, elle anime un atelier de tissage en République centrafricaine et participe à la Biennale internationale de design de Saint-Etienne en 2002 et en 2004. Plusieurs de ses pièces sont alors acquises par le Smithsonian National Museum of African Art de Washington. En 2003, le Centre culturel Albert Camus (l’actuel Institut français de Madagascar) organise sa première exposition personnelle, Le Traditionnel au xxi^e siècle. Elle y est de nouveau programmée en 2006 pour l’exposition personnelle La Saison des cultures, sous le commissariat de Rina Ralay Ranaivo et en 2013 pour Matières choisies. Dans les années 2010, elle prend part à plusieurs projets de design textile et de mode, notamment le projet Naturellement urbain (2010-2012), TransPorter/Lambahoany en mouvement (2011), et l’Ethical Fashion Show de Paris (2012). En 2018, ses œuvres sont présentées dans l’exposition Madagascar, arts de la Grande Île au musée du quai Branly – Jacques Chirac, puis en 2019 à la Fondation H, dans l’exposition L’Art au quotidien.

À l’été 2020, Madame Zo disparaît brusquement alors qu’elle vient de remporter le prix Paritana de la Fondation H. En 2023, cette dernière lui rend hommage à travers l’exposition Bientôt je vous tisse tous, sous le commissariat de Bonaventure Soh Bejeng Ndikung, Bérénice Saliou, Alya Sebti et Hobisoa Raininoro.