Rassem Ahmed, Al-Rassema Amy Nimr, Le Caire, 1933
→Azar Aimé, Femmes peintres d’Égypte, ch. « A. Nimr », Le Caire, Imprimerie française, 1953, p. 8-13
Amy Nimr. Exposition d’œuvres anciennes et récentes, galerie Bernheim Jeune, Paris, 19 – 30 avril 1926
→Amy Nimr Peintures, galerie de Marignan, Paris, 5 – 27 mai 1961
Peintre égyptienne.
Les biographies d’Amy Nimr publiées à ce jour présentent d’importantes lacunes et contradictions. Son année de naissance elle-même n’est pas clairement établie : si ses papiers officiels indiquent la date de 1907, il semblerait qu’elle soit en réalité née le 9 août 1898, au Caire. Ses parents, Ellen Eynaud, issue d’une famille d’ascendance britannique, française et autrichienne, et Faris Nimr, influent homme de presse levantin converti au protestantisme et installé en Égypte au début des années 1880, tiennent salon à Maadi, quartier huppé du Caire. A. Nimr grandit dans un environnement intellectuel et politique occidentalisé et, dès son plus jeune âge, partage sa vie entre l’Égypte, la France et l’Angleterre. Elle est scolarisée au Cheltenham Ladies’ College, puis poursuit des études à la Slade School of Fine Art à Londres (1916-1920) et fréquente l’atelier du postimpressionniste Walter Sickert.
C’est d’abord à Paris qu’A. Nimr montre son travail au public à l’occasion du Salon d’automne (1925), puis de sa première exposition personnelle à la galerie Bernheim-Jeune (1926). Le très officiel Salon du Caire présente ses œuvres à plusieurs reprises, contribuant à asseoir sa notoriété en Égypte dès le début des années 1930. Elle y est notamment remarquée par Mahmoud Saïd, l’une des figures de proue de la modernité picturale, et par l’écrivain Ahmed Rassim qui lui consacre un petit livre. Dès lors, A. Nimr expose à Londres, à la Warren Gallery (vers 1930), à Paris, à la galerie Vignon (1931), et au Caire, dans une galerie du nom de Kasr al-Doubarah (1935).
De ses débuts en peinture, on connaît des groupes de personnages aux silhouettes longilignes : baigneurs et pêcheurs, scènes religieuses et représentations de la communauté juive. Par la suite, A. Nimr affirme dans son style une parenté avec la peinture de Michel-Ange dont elle admire le caractère sculptural. À l’occasion de voyages en haute Égypte, elle réalise une série de têtes nubiennes, des portraits de Bédouins et des scènes équestres qui témoignent d’une recherche sur le volume par le clair-obscur, également visible dans ses natures mortes de fruits.
Les années 1930 marquent sa rencontre avec le surréalisme. D’abord à Londres, où elle expose à la Wertheim Gallery aux côtés de Barbara Hepworth et Robert Medley, puis à Paris, où elle occupe un atelier à la villa Seurat et se lie notamment avec Henry Miller. Au Caire, elle s’associe à Art et liberté (1938-1948), un groupe d’artistes et d’intellectuel·le·s convaincu·e·s que le surréalisme peut faire face à la montée des nationalismes, prémices de la Seconde Guerre mondiale. Pendant les hostilités, A. Nimr demeure sur le sol égyptien. Alors mariée au diplomate sir Walter Smart, elle reçoit dans sa villa l’intelligentsia cosmopolite et polyglotte du Caire et apporte son soutien financier à des artistes comme Lawrence Durrell. Mais, de cette époque, l’histoire et la littérature retiennent surtout un événement dramatique : lors d’un pique-nique dans le désert de Saqqarah en 1943, l’explosion d’une mine coûte la vie au jeune Micky, fils unique du couple. Quand, après une longue interruption, A. Nimr revient à la peinture, c’est pour produire les tableaux les plus noirs de sa période surréaliste – des squelettes et des corps monstrueux sombrant dans les abysses.
Au lendemain de la crise du canal de Suez et de l’évacuation de l’occupant britannique en 1956, A. Nimr est forcée de quitter l’Égypte avec son époux. Témoignant peut-être d’une difficulté à représenter un vécu douloureux, sa peinture se fait exclusivement abstraite à partir des années 1950, après de premiers essais au cours de la décennie précédente. Sa dernière exposition connue a lieu en 1961 à la galerie de Marignan à Paris. Le texte du catalogue, signé L. Durrell, évoque des jeux de texture « avec du gravillon âprement coloré, avec du sable, avec un caillou ». A. Nimr s’éteint à Paris le 24 janvier 1974.