Kahlo Frida, Le Journal de Frida Kahlo, Paris, Éditions du Chêne, 1995
→Herrera Hayden, Frida : biographie de Frida Kahlo, Paris, Le Livre de Poche, 2003
→Jamis Rauda, Frida Kahlo autoportrait d’une femme, Arles, Actes Sud, 1999
Frida Kahlo, Tate Modern, Londres, 9 juin – 9 octobre 2005
→Frida Kahlo: A Life in Art, Arken Museum, Ishøj, 7 septembre 2013 – 12 janvier 2014
Peintre mexicaine.
C’est auprès de son père, photographe, que Frida Kahlo apprend la photographie et la retouche en couleurs. En 1925, un violent accident de la circulation la laisse presque morte ; il conditionnera sa vie et toute son œuvre. La longue immobilisation forcée de cette jeune fille très énergique la pousse à se tourner vers l’une des seules activités qu’elle puisse exercer de son lit : la peinture. Enfant de la révolution moderne du Mexique (1911), durant un temps membre du parti communiste, elle est une militante engagée, inspirée par l’exemple de la photographe Tina Modotti. En 1929, elle épouse le géant de la peinture mexicaine : Diego Rivera. Esprit libre, elle affirme à la fois son adhésion à la modernité et la défense de la mexicanidad, notamment par ses tenues vestimentaires. Pendant toute sa vie, elle souffre des séquelles de l’accident de 1925, et ses grossesses se terminent toutes par une fausse couche. Mais si son œuvre exprime un rapport au corps essentiellement douloureux, il ne s’agit pas pour autant de se complaire dans la douleur, mais de l’extérioriser pour mieux la dominer, de tenter de la surmonter en la partageant. L’art de l’artiste peintre recherche une catharsis libératrice. Toute son œuvre peut être définie comme un journal en peinture : près de la moitié de sa production est constituée d’autoportraits.
Le tout premier tableau significatif, Autoportrait à la robe de velours (1926), porte la trace de son étude attentive des maîtres italiens de la Renaissance (en particulier Bronzino et Parmigianino), tout en affirmant la singularité d’un style très personnel, miniaturiste, d’inspiration populaire, et une très intense présence frontale du sujet. La plupart de ses tableaux extériorisent les sentiments profonds de l’artiste. La logique qui organise les motifs sur la toile relève d’images mentales (apparition simultanée de temps et d’espaces distincts dans une même œuvre). André Breton pensait que son art s’épanouissait en plein surréalisme. Mais l’œuvre de Frida Kahlo n’est pas réductible à son affinité avec le surréalisme, qu’elle rejette d’ailleurs. La maladie ne l’empêche toutefois pas de courir le monde, de séduire. Elle conquiert New York et son galeriste Julien Levy, l’élégant photographe Nickolas Muray et bien d’autres, hommes et femmes. Découvrant Paris en 1939, elle n’apprécie guère les artistes et intellectuels qu’elle rencontre autour d’André Breton ; seul Marcel Duchamp appelle ses louanges. De retour au Mexique, elle divorce de D. Rivera. Elle peint alors Las dos fridas (Museo de Arte Moderno, Mexico, 1939), l’une des plus célèbres et des plus grandes de ses œuvres. Le tableau montre deux facettes de la personnalité de l’artiste : deux amies assises côte à côte sur un banc, les deux cœurs reliés par une veine. À droite, la Frida mexicaine qui revendique et défend fièrement sa culture ; à gauche, dans une robe de style européen, la Frida émancipée. Avec cette œuvre riche en métaphores, l’artiste se libère de la pulsion suicidaire qui la traverse dans ce moment de rupture. Selon la tradition de l’ex-voto offert au saint en remerciement de la guérison, elle peint en 1951 l’Autoportrait avec le Dr. Juan Farill. C’est à la fois un classique autoportrait de l’artiste devant son chevalet et une œuvre emblématique de la peinture et du douloureux sort de F. Kahlo. Assise dans son fauteuil roulant, devant le chevalet où figure le portrait de l’affectionné docteur Juan Farill, elle tient dans sa main une palette qui n’est autre que son cœur et des pinceaux qui ruissellent de son sang. Peindre avec son sang, peindre avec son cœur.