Kogelnik Kiki, Wipplinger Hans-Peter, Längle Susanne et ali., Kiki Kogelnik : retrospektive = retrospective, cat. expo., Kunsthalle Krems, Krems (14 juillet – 6 octobre 2013), Nuremberg, Moderne Kunst Nürnberg, 2013
→Koglenik Kiki, Adlmann Jan Ernst, Néray Katalin et al., Kiki Kogelnik: expansions, thirty years New York, cat. expo., Ernst Museum, Budapest (1992), Vienne, Galerie Ulysses, 1992
→Pilar Zevallos, Jenni Sorkin, Wendy Voge, Kiki Kogelnik : inner life, Berlin, Hatje Cantz, 2017
Kiki Kogelnik: Inner Life, Kunsthall Stavanger, Stavanger, Norvège, 30 mars – 13 août 2017
→Kiki Kogelnik: I Have Seen the Future, Kunstverein, Hamburg, 15 septembre 2012 – 6 janvier 2013
→Retrospektive, 1935-1997, Österreichische Galerie Belvedere, Vienne, 1998
Plasticienne autrichienne, établie aux États-Unis.
Dans les années 1960, sur une scène artistique majoritairement masculine, l’artiste autrichienne Kiki Kogelnik n’a cessé d’interroger le corps, alliant féminisme et technologie. Née à Bleiburg, Kiki Kogelnik suit des études d’art à Vienne entre 1954 et 1958. Elle réalise des œuvres abstraites aux côtés des artistes Maria Lassnig et Arnulf Rainer mais se sent peu en phase avec l’expressionnisme abstrait. Suite notamment à sa rencontre avec Sam Francis, qui lui conseille de s’installer en États-Unis, elle emménage en 1961 à Santa Monica, puis à New York. Elle y fait la connaissance des figures emblématiques du pop art américain : Roy Lichtenstein, Andy Warhol, Robert Rauschenberg ou encore Claes Oldenburg. K. Kogelnik se porte vers la figuration et réalise des peintures, dessins et installations à l’esthétique pop : couleurs vives et chatoyantes, matières nouvelles et recours aux techniques industrielles. L’Amérique représente le pendant inverse de ce que K. Kogelnik a connu jusqu’alors en Autriche, encore fortement marquée économiquement par la Seconde Guerre mondiale. New York est l’emblème de la consommation de masse qui donne naissance à de nouveaux supports de diffusion, terreau du mouvement pop art. Fascinée par cette société de consommation désincarnée, elle interroge le corps social, politique et intime en capturant les contours de corps humains. Utilisant le sien ou celui d’ami·e·s, elle en trace les contours sur des matériaux divers (plastique, papier d’emballage, carton) qu’elle découpe et réemploie dans ses œuvres. Elle réalise notamment un ensemble de silhouettes taillées dans des pièces en vinyle coloré pour la série des Hangings qu’elle débute à la fin des années 1960. Ces profils sont ensuite suspendus à des cintres ou à des séchoirs telles des carcasses humaines. Les corps sont comme dépouillés et vidés de toute vie attendant sagement une résurrection.
Si l’anatomie est une thématique récurrente dans l’œuvre de l’artiste, la science et les nouvelles technologies y occupent également une place fondamentale. K. Kogelnik entretient avec ces dernières un rapport ambigu. Enfant de la bombe H, de la guerre du Vietnam et d’Hiroshima, les expérimentations scientifiques la fascinent autant qu’elles l’effraient. Bombe, fusées, vaisseau spatial, corps irradiés (Liquid Injection Thrust, vers 1965) et altérés – par l’ajout d’éléments électroniques (Transparent Woman, 1965), de rouages mécaniques (Vibration on a Composite Circuit, 1965), ou aux membres manquants – sont des motifs centraux de sa production. Les œuvres de K. Kogelnik ne cessent de naviguer entre deux mondes diamétralement opposés, entre dystopie et utopie où la science y est aussi oppressante et destructrice que libératrice et créatrice de sens. Marquée par un fort désir d’expérimentation, elle réalise dès la fin des années 1970 de grandes sérigraphies au cœur desquelles se déploient des personnages féminins fantasques. Les figures apparaissent peu à peu même si les traits du visage restent succincts, juste esquissés à la manière d’un masque. Ce motif du masque, K. Kogelnik le décline jusqu’à la fin de sa vie en sculpture continuant ainsi d’explorer la singularité des émotions dans un monde où les individus tendent à s’uniformiser. Utilisant d’abord la céramique, elle s’oriente vers le verre de Murano entre 1994 et 1996, matière dont elle s’ingénie à détourner l’aspect décoratif. Presque 20 ans avant Le Manifeste cyborg (A Cyborg Manifesto, 1985) de Donna Haraway, Kiki Kogelnik rêvait déjà d’un avenir posthumain où les identités et les corps ne cessent d’être déconstruits, dénaturés dans une volonté d’affranchissement, de puissance et d’énergie.
© 2017 Archives of Women Artists, Research and Exhibitions