Aux premiers temps des photographes. Roanne : cité modèle (1840-1940), Roanne, Médiathèque, 11 octobre – 29 novembre 2008, aujourd’hui exposition virtuelle
→Qui a peur des femmes photographes, 1839-1919, musée de l’Orangerie, Paris, 14 octobre 2015 – 24 janvier 2016
Daguerréotypiste française.
Daguerréotypiste professionnelle, Maria Chambefort était jusqu’à aujourd’hui identifiée à la personne de Marie Perraud, épouse Chambefort, ancienne lingère née à Mâcon en 1818 et morte à Roanne en 1875. Par l’un de ces heureux rebondissements que réserve la recherche dans le champ encore nouveau des femmes photographes françaises d’avant la Première Guerre mondiale, il s’avère que cette pionnière n’est pas M. Perraud mais sa fille, également prénommée Marie.
« Élève des premiers praticiens de Paris et de Lyon » – comme elle se présente dans la presse et sur ses étiquettes commerciales, M. Chambefort a été formée au métier à 16 ans par son oncle François Perraud (1814-1862), portraitiste établi à Lyon dans les années 1850 (une fois n’est pas coutume, ce sont les investigations autour de l’identité d’une femme photographe qui ont également rendu la sienne à un homologue masculin, F. Perraud étant connu dans l’histoire de la photographie sous le prénom erroné de Philibert, pour son parcours itinérant en Italie, en Grèce et en Turquie dans les années 1840).
Vers 1857, alors qu’elle a 17 ans à peine, la jeune daguerréotypiste s’engage dans une activité mobile à Mâcon, avant de l’étendre au département de Saône-et-Loire et, bientôt, à celui de la Loire. Après quatre ans d’itinérance aussi bien interdépartementale qu’intra-urbaine (Roanne), elle se sédentarise en 1861 dans la sous-préfecture ligérienne, y fondant le premier atelier fixe de la ville. La vogue est alors au portrait sur papier au format carte de visite. Cette sédentarisation se révélera particulièrement réussie, la photographe pouvant compter sur l’assistance de sa mère mais également de son frère François (1850-1925), de dix ans son cadet. À l’âge de 34 ans en 1874, l’entrepreneuse se marie avec celui qui était son voisin depuis une quinzaine d’années, un fabricant et négociant en textile du nom de Jacques Léon Chanteloube. Veuve et mère de deux filles, elle a 53 ans lorsqu’elle décède à Roanne en 1893. Son atelier ne lui survit pas.
M. Chambefort a figuré en 2015-2016 dans l’exposition Qui a peur des femmes photographes ? 1839-1919 au musée de l’Orangerie à Paris. Malgré le recensement systématique des photographes françaises que nous avons entamé à cette occasion, elle constitue encore un très rare cas de femme daguerréotypiste itinérante active sur le sol hexagonal : l’unique, à notre connaissance, à être aujourd’hui identifié à la fois par des sources premières et par un corpus de plaques. On peut aller jusqu’à dire qu’aucune photographe du Second Empire, y compris parmi les sédentaires, n’a livré à ce jour autant de données que M. Chambefort. Depuis 2019, cette praticienne est représentée dans les collections nationales à travers son seul daguerréotype au format pleine plaque qui soit répertorié (musée d’Orsay).
Publication en partenariat avec le musée d’Orsay.
© Archives of Women Artists, Research and Exhibitions