René, Louise, « Paule Charpentier », transcription de Mickael Caruge dans le cadre de l’ANR Alter, Archives de la CTM 14AV41, 2018.
→Marlène, Laure, « Paule Charpentier », dans Gerry L’Étang (dir.), La Peinture en Martinique, HC Éditions, 2007, p. 80-85.
→René, Louise, « Paule Charpentier », dans Peinture et sculpture en Martinique, Éditions caribéennes, 1984, p. 30-31. Fonds sonore
Artiste peintre martiniquaise.
Paule Jacques-Joseph, épouse Charpentier, est issue de la bourgeoisie noire de Fort-de-France. Son père, ébéniste d’art, possède une boutique au 29, rue Blénac, en plein centre-ville. Dès son plus jeune âge, P. Charpentier pratique le dessin, mais son père, soucieux des convenances, ne la laisse pas intégrer l’École des beaux-arts de Paris. Renonçant par conséquent à sa bourse du ministère des Colonies, elle choisit de suivre des cours particuliers chez le peintre autodidacte Fernand Peux (1883-1956), ancien militaire martiniquais métis, diplômé de l’Exposition des beaux-arts de Hanoï et propriétaire dans les années 1930 d’une boutique-atelier au 6, rue Amiral-Gueydon.
À l’âge de 24 ans, elle épouse le peintre Hector Charpentier (1910-1983) et le couple s’installe dans la commune du François. En 1936, la jeune P. Charpentier expose, pour la première fois, ses tableaux lors des fêtes du Tricentenaire. À partir de la Seconde Guerre mondiale, l’art antillais se conceptualise dans la rupture, la contestation, le rejet du modèle occidental et de l’art colonial par l’affirmation de la Négritude. Cette rébellion esthétique et thématique s’exprime dans la volonté des artistes afro-caribéen·ne·s de se réapproprier leur identité culturelle africaine. Dans les années 1945-1950, les Charpentier possèdent une galerie place Bertin, dans la ville de Saint-Pierre, et une seconde dans la commune du Morne-Rouge. P. Charpentier y pratique la peinture en haute pâte traduisant dans des compositions dynamiques, parfois tourbillonnantes, l’atmosphère chaleureuse et familière de la cité pierrotine avec son flot de figures féminines et masculines en mouvement dans des juxtapositions de touches colorées. Vidé du mercredi des Cendres (non daté), Le Vidé du carnaval (non daté), Bèlè (non daté), Le Combat de coqs (non daté) témoignent de sa prédilection pour la danse traditionnelle, les rassemblements et les traditions populaires. Artiste prolifique, elle cherche par sa peinture à représenter l’essence de la culture antillaise dans la continuité des aspirations des peintres de cette époque, dans une Martinique où la population noire est en majorité ouvrière. P. Charpentier est influencée par la peinture de Rembrandt, de Renoir et des impressionnistes qui orientent sa vision du portrait et du paysage. Elle privilégie le fusain, la peinture à l’huile et réalise des portraits et des paysages à base de vernis sur métal embossés. Audacieuse, elle élabore une couche picturale excédentaire, au couteau ou à la spatule, donnant une vibration à la surface. Comme son collègue, le peintre Alexandre Bertrand (1918-1995), professeur à l’École des arts appliqués, elle étudie la morphologie de la population locale, cherchant une authenticité et une vérité stylistique.
P. Charpentier est l’une des rares artistes noires de l’île, disposant de deux galeries d’art et dispensant également des cours de dessin. Son fils Hector Charpentier (1950-), lui aussi peintre, est diplômé des beaux-arts de Toulouse et conduit une carrière prestigieuse. L’ensemble du travail de Paule Charpentier fourmille d’ingéniosité. Il apparaît dans des collections familiales et privées, y compris en Europe, à la caserne militaire de Desaix à la Martinique et dans les collectivités locales.
Une notice réalisée dans le cadre du programme « The Origin of Others » en partenariat avec le Clark Art Institute.
© Archives of Women Artists, Research and Exhibitions, 2023