Pennefather Audie Marie, A True & Strange Story: The Life of Teuane Ann Tibbo, Artist 1895–1984, Tweed Heads, N.S.W, A.M. Pennefather, 2009
Keep it in the Heart: The Paintings of Teuane Tibbo, Lopdell House Gallery, Auckland, 2002
Peintre samoane.
La jeunesse de Teuane Tibbo, née peu après la fin de la première guerre civile des Samoa, est marquée par la révolte, l’instabilité et les bouleversements rapides. Jeune femme, elle assiste à l’occupation brutale des Samoa par l’armée néo-zélandaise et à la montée du Mau, un mouvement non-violent pour l’indépendance des Samoa face aux forces coloniales. En 1926, T. Tibbo s’installe à Fiji avec son second époux, Edward Tibbo. Ils déménagent ensuite en 1945 à Auckland, en Aotearoa (nom māori de la Nouvelle-Zélande), avec leurs cinq enfants. T. Tibbo commence à peindre dans les années 1960 et devient rapidement une figure importante de la scène artistique de la ville.
En 1964, elle devient la première artiste des îles du Pacifique à bénéficier d’une exposition individuelle dans une galerie privée du pays. L’année suivante, en 1965, son tableau Striped Fish and Coral [Poissons rayés et coraux, 1965] est acheté par l’Auckland Art Gallery, devenant ainsi la première de ses œuvres à entrer dans une collection publique. D’autres œuvres sont ensuite acquises par le Museum of New Zealand Te Papa Tongarewa à Wellington, la collection Hocken à Dunedin, l’Auckland University Art Collection et la National Gallery of Australia à Canberra.
T. Tibbo est une peintre autodidacte. Elle est connue pour ses compositions écrasées, ses couleurs vives, ses perspectives déformées et la clarté de sa vision. Nombre de ses œuvres décrivent la vie samoane au tournant du XXe siècle et s’inspirent de moments vécus dans sa jeunesse, laissant de ce fait la place à un certain émerveillement et à une imprécision liés à la nature même des souvenirs d’enfance. Ses tableaux sont immersifs et parfois déroutants – des qualités sans doute amplifiées par l’éloignement physique et temporel de l’artiste par rapport aux événements qu’elle représente. Les propriétés formelles des tableaux évoquent les expériences sensorielles qu’ils décrivent, à l’image de Firewalkers [Marche sur le feu], dans lequel l’usage de motifs détaillés, de tons éclatants de rouge, jaune et vert et d’un point de vue en contre-plongée traduit l’intensité physique et spirituelle d’une cérémonie de marche sur le feu. Ces paysages typiquement « pacifiques » tranchent avec les natures mortes de T. Tibbo, qui représentent souvent des vases de fleurs ornementales introduites en Aotearoa par les colons européens – Opium Poppies (Pavots, 1968) et Father’s Day Flowers (Fleurs de la fête des pères, 1965) – et qu’elle cultive pour la plupart dans son jardin. Lorsque Opium Poppies est exposé pour la première fois à Auckland, le tableau attire l’attention de la police locale, qui s’inquiète de la présence de cette plante illégale dans l’arrière-cour du pavillon de T. Tibbo.
En 1965, Barry Lett ferme l’Uptown Gallery et ouvre une nouvelle galerie à son nom. T. Tibbo y expose jusque dans les années 1970, ainsi qu’à l’Auckland Museum et à l’Auckland Art Gallery. Elle décède en 1984, à l’âge de 89 ans. Son œuvre a depuis été présentée à titre posthume lors de nombreuses expositions sur l’art des îles Pacifiques, parmi lesquelles Te Moemoeā No Iotefa à la Sarjeant Gallery Te Whare o Rehua Whanganui en 1990, Oceania: Imagining the Pacific à la City Gallery de Wellington en 2011 et Home AKL à l’Auckland Art Gallery en 2012. En 2001, la Lopdell House d’Auckland organise la première rétrospective consacrée à l’artiste, Keep It in the Heart: The Paintings of Teuane Tibbo.
Publication réalisée en partenariat avec Contemporary HUM et le soutien de Creative New Zealand.
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