Critique

Quelle place pour les artistes femmes à la Milan Art Fair (MiArt) 2017 ?

15.05.2017 |

GOD, vue de l’installation, photo © Flora Fettah

MiArt, nouvelle arrivée dans le paysage des foires internationales d’art contemporain, a su proposer pour cette édition 2017 une programmation intéressante dans ses différentes « sections focus » comme dans ses « hors-les-murs ». Mais quid de la représentation des artistes femmes ?

Si, le nombre d’artistes femmes présentées par les galeries est, comme à l’accoutumée, inférieur à celui des hommes, de nombreuses exceptions confirment la règle. Parmi les galeries italiennes, nous relèverons donc les travaux d’Elizabeth McAlpine, cinematic sediments (Rita Urso, ArtopiaGallery), de Sissi, Diario di un ventre scavato (Galleria Tiziana Di Caro), ou des cinq artistes présentées par la galerie SpazioA : Dina Danish, Esther Kläs, Giulia Cenci, Katarina Zdjelar et Chiara Camoni, dont le travail Senza Titolo (Laocoonte) a, par ailleurs, été sélectionné par la Fondazione Fiera Milano. D’autres encore, comme LIA RUMMA, montrent des travaux plus internationaux et historiques, avec Artist Portrait with a Candle (2012) et THE KITCHEN V Carrying Milk (2009) de Marina Abramović.

Quelle place pour les artistes femmes à la Milan Art Fair (MiArt) 2017 ? - AWARE Artistes femmes / women artists

Elizabeth McAlpine, Cinematic sediments, 2015, Rita Urso ArtopiaGallery, photo © Flora Fettah

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Chiara Camoni, Senza Titolo (Laocoonte), 2017, SpazioA (prix de la Fondazione Fiera Milano), photo © Flora Fettah

Alors que de nombreuses galeries tentent de rétablir l’équilibre, les résistances sont nombreuses. On l’observe notamment dans la catégorie « émergent », où si certaines galeries affirment leur volonté de promouvoir les artistes femmes, elles sont deux fois moins nombreuses que les hommes (11 femmes pour 23 hommes parmi les vingt corners). Ainsi, le prix BeArt Prize for Emergent revient à la galerie parisienne pact qui présentait les artistes Amy Brener et Manuel Scano Larrazàbal et qui, plus largement, s’attache à promouvoir les artistes femmes. Mention spéciale au stand de Ribot, le seul entièrement féminin, avec Lorenza Boisi et Kaye Donachie. Nous retrouvons également Alona Rodeh, artiste israélienne présentée par Grimmuseum (Berlin), qui examine les expressions visuelles et sonores de la sécurité (à l’échelle personnelle comme collective) au travers de sculptures, de vidéos, d’installations, de photographies et de performances (Safe and Sound Poster Series) ; ou encore Stefania Batoeva (Emalin Gallery), Sarah Faux (Stems Gallery), Gina Folly (Ermes Ermes), Hella Gerlach (Acappella, qui présente également le duo mixte Pennacchio Argentato), Janina Mcquoid (BFA – Boatos Fine Arts), Vivien Zhang (House of Egorn).

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Manuel Scano Larrazàbal & Amy Brener, pact, photo © Flora Fettah

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Alona Rodeh, Grimmuseum, photo © Flora Fettah

Par ailleurs, MiArt se fait fort de présenter une véritable proposition curatoriale, par Douglas Fogle et Nicola Lees, avec la section « generation » où douze galeries font dialoguer deux artistes de différentes générations pour un accrochage commun, faisant se rencontrer travaux historiques et expérimentations nouvelles. Si l’on peut regretter le manque de mixité dans les duos, trois parmi les six sont féminins ; ainsi se rencontrent Sheila Hicks et Fernanda Gomes, Ruth Wolf-Rehefeld et Anna-Bella Papp, Barbara Kasten et Jessica Stockholder, sous les auspices respectifs de la Alison Jacques Gallery (Londres), ChertLüdde (Berlin), Bortolami et la Galleria Raffaella Cortese (gagnant du Fidenza Village Prize for Generations).

Enfin, « On demand » est une section transversale qui encourage les galeries à montrer des œuvres in situ (installations, wall drawings, performances, etc.), nécessairement activées par ceux qui les possèdent. Il s’agit pour Oda Albera, chargée des projets spéciaux et du lien avec les exposants, d’affirmer que le fait de collectionner induit une forme de responsabilité1 . Ainsi, vingt-deux artistes sont distingués parmi l’ensemble de ceux présents à la foire ; parmi eux, 6 seulement sont des femmes : Nathalie Du Pasquier (Apalazzogallery), Lena Henke (Galerie Emanuel Layr), Meris Angioletti (Otto Zoo), Lucy Harvey (Anthony Reynolds Gallery), Karin Lehmann (Federica Schiavo Gallery) et Chiara Camoni (SpazioA).

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Sheila Hicks & Fernanda Gomes, Alison Jacques Gallery, photo © Flora Fettah

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Barbara Kasten & Jessica Stockholder, Bortolami et Galleria Raffaella Cortese, photo © Flora Fettah

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Ruth Wolf-Rehefeld & Anna-Bella Papp, ChertLüdde, photo © Flora Fettah

Parmi les prix attribués lors de la MiArt, le Fondazione Fiera Milano Acquisition Fund « Giampiero Cantoni », a acquis davantage de travaux d’artistes femmes que d’hommes : Olympe des Gouges par Goshka Macuga (Andrew Kreps Gallery, New York), Yes I Believe Every Word You Say par Andrea Büttner (Hollybush Gardens, London), Senza Titolo (Laocoonte) par Chiara Camoni (SpazioA, Pistoia), Untitled par Annabella Papp (Stuart Shave/Modern Art, London) et Valley Fire par Monica Bonvicini (Galleria Raffaella Cortese, Milan).

Hors les murs de la MiArt, la programmation était riche ; ainsi l’ECAL, dans l’exposition More Rules for Modern Life, curatée par John M. Armleder, donnait à voir les travaux de ses élèves s’interrogeant sur la frontière entre art et décoration. Une exposition majoritairement féminine (vingt travaux sur les vingt-neuf présentés) où les œuvres forment un ensemble presque indissociable, une œuvre cohérente et quasi-totale. Également, GOD, exposition de l’Atelier Biagetti, proposait une analyse impertinente et pertinente des obsessions de la société contemporaine au travers d’un projet immersif de design expérimental, curatée par Maria Cristina Didero2. Elle explorait la question de l’argent au travers d’installations participatives, volontairement kitsch, véritable temple à la nouvelle idole du XXIe siècle, où le visiteur est invité à en devenir l’un des prêtres, exécutant les différents rites : examen du cours boursier, achat, espoir et possession.

Pour conclure, c’est un bilan en demi-teinte pour l’égalité des genres à MiArt : si la foire compte 250 travaux d’artistes femmes3 et que plusieurs galeries œuvrent sciemment pour plus de parité, elles demeurent pourtant minoritaires face aux artistes masculins. Nous pouvons cependant nous demander s’il s’agit d’une surprise face au peu d’intérêt pour la parité dans les équipes curatoriales, où bien rares sont les femmes.

MiArt, Milan, 31 mars – 2 avril 2017, www.miart.it.

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