Niepodległe: Women, Independence and National Discourse, The Museum pf Modern Art in Warsaw, Varsovie, octobre 2018- février 2019
→Colette Omogbai, Mbari, Ibadan, 1963
Peintre et enseignante d’art nigériane.
Née dans l’actuel État d’Edo, dans le sud du Nigeria, Colette Omogbai passe sa jeunesse à Zaria, dans le nord du pays. En 1963, alors qu’elle est encore une simple étudiante en art au Nigerian College of Arts, Science and Technology (NCAST, l’actuelle Ahmadu Bello University) à Zaria, elle présente ses tableaux surréalistes au centre culturel Mbari Club, à Ibadan, dans l’ouest du Nigeria, sur l’invitation d’Ulli Beier, le commissaire d’exposition allemand qui tient le lieu. Il est à noter que C. Omogbai est l’une des rares femmes artistes – à l’instar de Susanne Wenger (1915-2009) et Georgina Beier (née en 1938) – dont les œuvres sont promues par U. Beier et présentées lors des expositions qu’il organise.
Le rejet radical du réalisme académique que reflètent profondément les tableaux de C. Omogbai, dont l’expressivité et l’anticonformisme sont inspirés par les formes traditionnelles de la sculpture africaine, constitue une étape importante dans le modernisme postcolonial au sein de l’art nigérian. Son travail est remarqué par la critique et les élites artistiques à la suite d’une seconde exposition à l’Exhibition Centre de Lagos. Une critique écrite par Babatunde Lawal, parue dans Nigeria Magazine en 1963, déplore l’absence d’une « touche féminine » dans l’œuvre de C. Omogbai. Cette dernière réplique en publiant en 1965 un manifeste féministe dans le même magazine, intitulé « Man Loves What Is ‘Sweet’ and Obvious ».
Une fois diplômée du NCAST en 1964, C. Omogbai poursuit ses études artistiques à Londres, à la Slade School of Fine Art. Elle retourne ensuite dans le sud du Nigeria, à Benin City, où elle fonde la galerie Olokun avec Chief Ovia Idah (1908-1968). En 1976, elle obtient un doctorat en enseignement artistique à la New York University. Elle retourne au Nigeria la même année et devient membre de la fonction publique en tant que professeure et administratrice d’école d’art.
Étrangement, nous ne savons que très peu de chose sur l’artiste et sur sa pratique au-delà de ses expositions à Ibadan et à Lagos en 1963 et de son manifeste de 1965. L’un de ses tableaux, Agony (1963), présenté lors de l’exposition au Mbari Club, fait désormais partie de la collection Iwalewahaus à l’Universität Bayreuth. Ce n’est que récemment, à la faveur d’un intérêt renouvelé pour l’histoire de l’art moderne africain, qu’Agony a été remis en lumière et a soulevé des interrogations sur l’identité de sa créatrice. Par la suite, le tableau figure dans plusieurs événements importants : Postwar: Art between the Pacific and the Atlantic, 1945-1965, organisé par Okwui Enwezor à la Haus der Kunst de Munich (2016-2017) ; Women on Aeroplanes au Centre for Contemporary Art, Lagos (2018-2019) ; Into the Night: Cabarets and Clubs in Modern Art au Barbican Centre, Londres (2019-2020).
D’après l’artiste elle-même, les exigences de son emploi de fonctionnaire et le déclin de son intérêt pour les arts traditionnels africains qui avaient inspiré son travail ont été les facteurs déclencheurs de la fin abrupte de sa pratique d’atelier, au profit de choix de carrière davantage axés sur la fonction publique et la philanthropie. C. Omogbai est désormais à la retraite et vit aux États-Unis.
Publication réalisée dans le cadre de la Saison Africa2020.
© Archives of Women Artists, Research and Exhibitions