Patricia Falguières (dir.), Cristina Iglesias, cat. expo., Carré d’art, Nîmes (11 mars – 12 juin 2000), Nîmes/Arles, Carré d’art/Actes Sud, 2000
Cristina Iglesias, Irish Museum of Modern Art, Dublin, 2003
→Cristina Iglesias, Drei hängende Korridore, Ludwig Museum, Cologne, 25 mars – 26 juin 2006
→Cristina Iglesias, musée de Grenoble, 23 avril – 31 juillet 2016
Plasticienne espagnole.
Cristina Iglesias s’est imposée sur la scène artistique internationale au milieu des années 1980. Après des études à Londres, où elle a découvert la sculpture britannique contemporaine, elle retourne à Madrid et y développe son propre vocabulaire formel. Elle appartient à la génération du début des années 1980, qui a redécouvert les potentialités de la figure, de l’image, du décoratif, du motif, et a ouvert l’objet sculptural à son expansion dans un site. En interrogeant l’espace traditionnel du white cube, l’artiste convie le spectateur à pénétrer un univers nouveau et mystérieux. Intéressée par la poésie des matières et leurs traces immatérielles, elle interroge la nature intrinsèque de ces corps, et révèle autant le dialogue du fer, du bois, du zinc, du cristal et des végétaux que leurs jeux d’ombres pour toujours subvertir les règles d’une géométrie trop formelle. À ces motifs abstraits, elle ajoute ensuite des jeux de mots, des phrases, une fiction que le tissage entremêle. Dans Sans titre (Celosia III, 1998), les matériaux pauvres tapissent l’espace de lettres formant un environnement clos en trois dimensions, que la lumière traverse pour en déployer la force dans l’environnement. Du raphia, de la corde végétale de sisal et de la lumière composent aussi Sans Titre (Passage II, 2002), une installation de 17 nattes suspendues au-dessus du visiteur et traversées par la lumière, dessinant ainsi un chemin d’ombres et de lettres, qui raconte la descente sous terre d’un calife arabe, extraite d’un conte de William Beckford. Ces mises en espace incorporent l’expérience physique du visiteur dans une œuvre ouverte, et poursuivent la déconstruction des conventions sculpturales : ni masse, ni substance, ni volume, ni géométrie.
Dès le début des années 2000, le travail de C. Iglesias s’inscrit dans l’espace public et interroge les rapports entre le site, le temps et l’environnement. Devant le musée royal des Beaux-Arts d’Anvers est installée Deep Fountain (1997-2006), une grande fontaine en perpétuel mouvement ; une fois vidée, elle laisse voir, de part et d’autre de sa profonde fente, son fond organique et végétal, composé de feuilles d’eucalyptus moulées ; pleine, elle reflète la façade du musée et invite alors le public à une visite à travers le temps. En 2006-2007, la plasticienne réalise les monumentales portes en bronze du musée du Prado (Madrid). Avec Estancias sumergidas (2011), œuvre sous-marine installée in situ dans la péninsule de Baja California, elle poursuit ses recherches sur la perception de l’espace. Sur une série de murs de béton sculptés et évidés par des motifs géométriques, elle transcrit les vers du poème Histoire naturelle et morale des Indes de José d’Acosta. Fidèle à son vocabulaire formel et poétique, tout en révélant la véritable nature d’un lieu, elle dissimule, par le même geste, une partie de son œuvre. Récemment, son intérêt pour la lumière et la matière, la nature et l’environnement nourrit ses sculptures telles que Pozo I et Pozo II (2011), qui poursuivent toujours les mêmes enjeux plastiques et organiques. Un bas-relief naturel de végétation et d’eau est intégré au cœur de l’œuvre de granite et de bronze, permettant alors au Land art d’investir l’espace du white cube. C. Iglesias a bénéficié de nombreuses expositions personnelles, notamment à la fondation Arnaldo Pomodoro à Milan (2009-2010), à la Pinacoteca de São Paulo (2009), au Irish Museum of Modern Art de Dublin (2003), à la Whitechapel Gallery de Londres (2003). Conceptrice du pavillon de l’Espagne à Venise, lors des Biennales de 1986 et de 1993, elle a aussi participé à plusieurs manifestations collectives, parmi lesquelles la Triennale de Folkestone, au Royaume-Uni (2011), et l’exposition elles@centrepompidou.