Didier Monciaud, « Les engagements d’Injî Aflâtûn dans l’Égypte des années quarante : la radicalisation d’une jeune éduquée au croisement des questions nationale, femme et sociale », Cahiers d’histoire, n°126, Paris, 2015
→Anneka Lenssen, « Inji Efflatoun: White Light », Kaelen Wilson-Goldie, « Public/Private: The Many Lives of ‘Rebel Painter’ Inji Efflatoun », Afterall, n°42, Londres, automne-hiver 2016
→Anneka Lenssen, Sarah Rogers, Nada Shabout, What We Want to Say: Arab Art in the Twentieth Century – Primary Documents, New-York, Museum of Modern Art, 2017
Enji Efflatoun, exposition itinérante, Moscow, Prague, Sofia, 1974
→Barjeel Art Foundation Collection – Imperfect Chronology: Debating Modernism I, Whitechapel Gallery, Londres, 8 septembre – 16 décembre 2015
→Mother Tongue: Selected Works by Inji Efflatoun, Mathaf: Arab Museum of Modern Art, Doha, 2015-2016
Peintre égyptienne.
Inji Efflatoun naît en 1924 au sein d’une famille aisée de l’aristocratie francophone du Caire. Sa mère, divorcée, ouvre la première boutique de confection textile dirigée par une femme. Inji Efflatoun suit une éducation catholique stricte avant d’intégrer le lycée français du Caire, où elle se familiarise avec le marxisme. Elle commence à peindre tôt et prend, dès l’âge de quinze ans, des cours avec Kamel el-Telmissany, l’un des représentants du surréalisme égyptien. Le peintre l’introduit au sein du mouvement « Art et Liberté », groupe d’artistes et d’intellectuels d’orientation communiste et anti-impérialiste qui met en œuvre les procédés de création surréalistes, une influence perceptible dans les premières œuvres de l’artiste.
Au sein d’« Art et Liberté », Inji Efflatoun affirme ses positions politiques. Elle s’engage au début des années 1940 dans une activité de militantisme intense qui durera près de quinze ans. L’une des premières femmes à étudier dans la section artistique de l’université du Caire, elle participe en 1945 au lancement de la Ligue des jeunes femmes des universités et des instituts, qui défend une ligne de gauche anticoloniale et milite en faveur de l’égalité hommes-femmes. Brièvement enseignante puis journaliste, elle publie plusieurs manifestes et participe, aux côtés d’un petit groupe d’intellectuelles et de militantes, à de nombreuses actions en Égypte et en Europe en faveur des droits des femmes et de la paix.
Les années 1950 voient la notoriété d’Inji Efflatoun grandir au sein de la communauté artistique égyptienne et internationale. Son travail est présenté dans le nouveau pavillon égyptien à la Biennale de Venise en 1952 et à la IIe Biennale de São Paolo en 1953. Dans la seconde moitié des années 1950, probablement influencée par sa rencontre avec le muraliste mexicain David Alfaro Siqueiros, elle adopte un style proche du réalisme socialiste. Elle peint des portraits des fellahin, les paysans sans terre égyptiens, et revient sur plusieurs épisodes violents de l’occupation anglaise, notamment dans l’encre sur papier du Massacre de Dinshaway (années 1950). Les activités politiques qu’elle continue de mener clandestinement conduisent à son interpellation en 1959 par les forces de Nasser lors d’une vague d’arrestations visant les communistes. Elle est emprisonnée durant plus de quatre ans dans un camp tenu secret.
De sa libération en 1963 à son décès en 1989, Inji Efflatoun se consacre à la peinture et participe de manière sporadique à la vie politique du pays. Elle expose en Égypte et en Europe, et devient une figure respectée du monde de l’art. Son intérêt pour la classe ouvrière continue de se manifester dans de nombreux paysages et scènes de la vie rurale. Son style se fait plus contemplatif, avec une grande importance donnée à la réserve, qu’elle appelle « lumière blanche ».
L’œuvre pictural et l’héritage militant d’Inji Efflatoun, documentés par ses écrits et mémoires, appartiennent à l’histoire moderne de l’Égypte et ont été largement diffusés dans le monde arabe. Une partie de sa production est visible au Musée d’art moderne du Caire. Mal connu en Europe, son œuvre a bénéficié d’un regain d’intérêt ces dernières années, et plusieurs expositions lui ont été consacrées. Elle fait aujourd’hui l’objet d’écrits et d’études universitaires en Europe et aux États-Unis.
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