Russell Storer, Situation : Collaborations, Collectives and Artist Networks from Sydney, Singapore and Berlin, Sydney, Museum of Contemporary Art, 2005
→The Artists Village’s AIM – Artists Investigating Monument II 2004, for SENI : Singapore 2004 art and the contemporary, Singapour, The Artists Village, 2004
→The New Criteria, Singapour, The Substation, 1992
Future of Imagination 6: International Performance Art Event, Sculpture Square, Singapore, 7 – 10 avril 2010
→Kites, Veils and Boarding Passes, Plastique Kinetic Worms, Singapour, 6 – 22 décembre, 2007
→CP Open Biennale, The National Art Gallery, Jakarta, 4 septembre – 3 octobre 2003
Artiste multidisciplinaire singapourienne.
La performance et la collaboration sont intrinsèques à la pratique de Juliana Yasin. Son goût pour le mouvement et pour la conscience sociale se développe durant ses études au Lasalle College of the Arts, à Singapour (1989-1990). Elle est alors membre de New Age Players and Company. Cette troupe met en spectacle la destruction écologique au Singapore Arts Festival Fringe de 1990, auquel assistent des personnes détenues. En 1993, J. Yasin quitte Singapour pour Perth, en Australie, afin de poursuivre des études d’art à la Claremont Art School (1994), puis obtient un Bachelor of Arts en arts visuels de la Curtin University of Technology (1996).
De retour à Singapour, elle rejoint les collectifs The Artists Village (TAV) et Plastique Kinetic Worms (PKW) ainsi que l’association d’artistes de Malaisie A.P.A.D. Sa première exposition individuelle, Collaborations (PKW, 1999), présente des représentations de son visage par des confrères et consœurs de différents pays et s’ouvre sur son portrait photocopié. La reproduction de son visage ne consiste pas en une tentative narcissique d’autopromotion, mais en une forme directe de communication avec les personnes participantes. Pour l’événement Artists Investigating Monuments II (2004), organisé par TAV, elle collabore avec Jeremy Hiah (né en 1972) et Kai Lam (né en 1974) afin de créer la performance Raffles in the ACT. Celle-ci implique le transport d’une statue interactive du fondateur colonial de Singapour, Stamford Raffles, vers des sites majeurs. La sculpture enregistre des conversations entre les artistes et l’assistance, et l’événement culmine avec l’installation de l’œuvre au Singapore Art Museum. La performance est une réponse à l’héritage socio-historique de la Singapour moderne ainsi qu’un moyen de documenter les aspirations contemporaines du public.
En tant que femme sino-malaisienne musulmane, J. Yasin doit affronter des problèmes liés à l’identité ethnique, au genre et au corps. Dans un événement collaboratif organisé par TAV, intitulé Her Identity (1992), elle découpe des représentations de corps dans des revues de mode et des magazines pornographiques, les agrandit, puis essaye de les assembler au corps réel et nu de l’artiste Amanda Heng (née en 1951). Elle symbolise ainsi la quête des femmes vers un idéal de beauté inatteignable. Elle questionne aussi les définitions limitées des femmes dans l’islam et créé la performance controversée The Veil (2001), où, vêtue de noir et le visage masqué, elle tient une pancarte sur laquelle il est écrit « The Subjugation of Women is a Worn-Out Habit in Saudi Arabia » [La soumission des femmes est une coutume dépassée en Arabie saoudite] (la version originale joue sur la polysémie du terme anglais « worn-out habit » qui peut à la fois s’entendre comme « coutume dépassée » et « habit élimé »). Présentée à Singapour, en Thaïlande et en Allemagne, elle illustre la manière dont une femme doit prouver au grand jour sa chasteté ou son statut de propriété maritale.
En 2006, J. Yasin coorganise le Ier Festival d’art de Jatiwangi, village qui devient son second foyer. Faisant suite à une résidence qu’elle y effectue, son exposition individuelle Tali Timba (2009) explore le motif du cerf-volant comme une métaphore du mouvement et de la liberté. Elle invite un fabricant de cerfs-volants de Bandung à animer un atelier sur deux jours à destination des villageois. L’artiste se voit comme un cerf-volant atteignant directement le cœur de la communauté et appelle les habitant·es à se réunir dans un vol onirique vers l’art. Un an plus tard, elle crée un album avec des musicien·nes indonésien·nes, intitulé For Peace and Togetherness, qui célèbre la paix, l’amour et la solidarité entre les peuples. Ses deux albums de chansons sont présentés de manière posthume au sein d’une installation sonore à la Biennale de Singapour de 2019.
J. Yasin est aussi chercheuse sur Singapour auprès de Asia Art Archive, à Hong Kong (2004-2006), et enseigne au Kolej Bandar Utama de Kuala Lumpur. Elle meurt en 2014, après une longue bataille contre le cancer du col de l’utérus.
Une notice réalisée dans le cadre du programme The Flow of History. Southeast Asian Women Artists, en collaboration avec Asia Art Archive
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