Helene Schjerfbeck, Deux profils, Marianne Stokes au premier plan, 1881, huile sur panneau de bois, 22 x 34 cm., Helsinki, musée d’Art, © Kansallisgalleria
Voisin Fonteneau Estelle, Marianne Preindelsberger Stokes : les années de formation, thèse de doctorat en histoire de l’art, sous la direction de Bruno Foucart, soutenue à l’Université Paris-Sorbonne, 2001
Utmost Fidelity : The Painting Lives of Marianne and Adrian Stokes, Wolverhampton Art Gallery, Wolverhampton, 31 janvier – 28 mars 2009
Peintre autrichienne-britannique.
Marianne Preindlsberger Stokes est une artiste qui ne s’est jamais déclarée d’un groupe précis mais dont les toiles ont été successivement décrites comme naturalistes, symbolistes, décoratives ; certaines peuvent même être rapprochées du style impressionniste.
Après des premières études à l’Académie de dessin de Graz, M. Stokes obtient une bourse qui lui permet de partir pour Munich en 1874. L’Académie des beaux-arts de Munich n’étant pas encore ouverte aux femmes, elle prend des leçons auprès du professeur Wilhelm Lindenschmit le Jeune (1829-1895). À Paris en 1880, M. Stokes étudie à l’académie Trélat de Vigny puis à l’académie Colarossi, où elle gagne une médaille pour un « concours de têtes d’expressions » en 1882. Elle rencontre la peintre finlandaise Helene Schjerfbeck (1862-1946), avec qui elle noue une longue amitié. Après la fermeture saisonnière des ateliers parisiens, elles partent peindre en Bretagne en 1881. M. Stokes expose pour la première fois en France en 1883 : deux toiles à la Société des amis des arts de Seine-et-Oise, à Versailles. Elle obtient une « mention honorable » au Salon de Paris de 1883 avec Réflexion. Le livret du Salon de 1883 et 1884 cite l’artiste comme élève de Gustave Courtois (1852-1923) et Raphaël Collin (1850-1916).
En juillet 1883, séjournant à l’hôtel des Voyageurs à Pont-Aven, M. Stokes rencontre son futur époux, le paysagiste britannique Adrian Scott Stokes (1854-1935). Tous deux catholiques, ils se marient en 1884. Le couple réside à Londres puis dans la colonie d’artistes de St Ives, dans les Cornouailles, et effectue de nombreux voyages. Inspiré par ces voyages (Suisse, Italie, Irlande, Danemark, Autriche, Hongrie), A. Stokes publie plusieurs articles et livres illustrés par les peintures et gravures de sa femme ainsi que par ses propres œuvres. Il peint les paysages et elle représente les mères et les enfants.
C’est après un séjour en Italie au début des années 1890 que M. Stokes se détourne de la peinture à l’huile pour un médium plus spirituel : le gesso grosso et la tempera. Elle s’éloigne des couleurs de terre et du naturalisme et tend vers l’art décoratif, religieux et symbolique. Suivant la tradition préraphaélite, elle signe ses toiles d’un monogramme après 1895. Peinte à l’huile, St Elizabeth of Hungary spinning for the poor (1895) marque cette transition et Madonna & Child (vers 1907-1908) en est la réalisation.
Parmi ses nombreuses expositions, M. Stokes gagne une médaille d’or à la Chicago World’s Fair de 1893 et est élue membre de la Society of Painters in Tempera en 1905. La National Portrait Gallery achète le portrait de John Westlake en 1921 et l’artiste est élue membre associée de la Royal Society of Painters in Water Colours en 1923.
M. Stokes peint les femmes et les enfants, ce qui est accepté par ses contemporains sans bousculer la norme. Mais, en montrant le divin dans le petit, le journalier, elle pose une certaine rébellion. Son œuvre est une synthèse des mouvement artistiques : naturalisme, impressionnisme, art décoratif et symbolisme. Par les thèmes explorés – maternités, travail, solitude, dévotion, piété –, elle montre sa propre spiritualité. Elle peint des représentations d’enfants dans un espace liminal, à la frontière de l’adolescence – la période où l’enfant perd son innocence. Que le sujet de la toile soit religieux, paysan, anecdotique ou symboliste, il possède un certain silence, un sentiment de piété qui est la ligne directive de son œuvre. Les toiles de M. Stokes sont présentes dans les collections de plusieurs musées internationaux comme le musée d’Orsay à Paris, la National Portrait Gallery à Londres ou la Walker Art Gallery à Liverpool.
Publication réalisée en partenariat avec le musée d’Orsay.
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