Ceija Stojka, Auschwitz ist mein Mantel : Bilder und Texte, Vienne, Exil, 2008, traduit en français sous le titre Auschwitz est mon manteau, et autres chants tsiganes, Paris, Bruno Doucey, 2018
→Sojka Ceija, Ceija Stojka, Lyon, Fage, 2017
→Meier-Rogan Patricia, Helmreich Franzi, Ceija Stojka : Bilder & Texte 1989-1995, Vienne, Patricia Meier-Rogan, 1995
Ceija Stojka: Esto ha pasado [Ça s’est passé : Ceija Stojka], Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia, Madrid, 22 novembre 2019 – 23 mars 2020
→Ceija Stojka, une artiste Rom dans le siècle, la Maison rouge-Fondation Antoine de Galbert, Paris, 23 février – 20 mai 2018
→Ceija Stojka, 1933 – 2013 : sogar der Tod hat Angst vor Auschwitz [Ceija Stojka, 1933 – 2013 : même la mort à peur d’Auschwitz], Kunstverein Tiergarten – Galerie Nord, Berlin, 21 juin – 26 juillet 2014 ; Galerie de la Villa Schwartzsche, office culturel Steglitz-Zehlendorf, Berlin, 2 juillet – 31 août 2014 ; Mémorial de Ravensbrück, Fürstenberg-Havel, 13 juillet – 12 septembre 2014
Peintre et poétesse autrichienne.
Ceija Stojka naît dans le Land autrichien de Styrie. Ses parents sont issus d’une lignée de marchands de chevaux roms, originaires de Hongrie et installés depuis deux siècles en Autriche, les Lovara. Alors qu’elle est encore une petite fille, en raison des restrictions et des discriminations qui touchent la communauté tsigane, sa famille se voit obligée de se sédentariser. En 1941, son père est déporté à Dachau et sa mère se cache avec ses enfants. L’année suivante, son père est assassiné au centre de mise à mort de Hartheim, où il a été transféré. En 1943, C. Stojka, sa mère et ses cinq frères et sœurs sont arrêté·e·s et déporté·e·s à Auschwitz-Birkenau. Un an plus tard, elle est envoyée à Ravensbrück avec sa mère et une de ses sœurs ; très jeune, elle est témoin de scènes d’une terrible cruauté. La famille est encore séparée l’année qui suit : C. Stojka est déplacée à Bergen-Belsen, avant d’être libérée par les troupes anglaises. Plus tard, elle dira qu’elle a dû sa survie dans ce dernier camp à une branche d’arbre dont elle a gratté l’écorce pour en récupérer la sève.
Avec sa mère, C. Stojka rentre à pied à Vienne où elle retrouve ses deux sœurs et deux de ses frères qui ont réchappé des camps. On estime que 90 % de la population rom autrichienne, déportée massivement dès la fin des années 1930, a été exterminée ; les rescapé·e·s revenu·e·s dans le pays vivent dans des conditions très difficiles à leur retour.
La famille Stojka reprend son commerce de chevaux à la fin des années 1940 ; en 1955, C. Stojka, qui habite toujours à Vienne, vend des tissus au porte-à-porte, puis obtient quelques années plus tard un permis pour exercer le métier de marchande de tapis sur les marchés. Au milieu des années 1980, son frère Karl (1931-2003) commence à exécuter des tableaux figurant son expérience concentrationnaire. En 1988, C. Stojka fait publier un premier texte (Wir leben im Verborgenen, paru plus tard en français sous le titre Nous vivons cachés), dans lequel elle raconte ses souvenirs de la guerre, et elle réalise ses premières peintures et dessins.
Il est difficile de classer sa production picturale en différentes périodes, dans la mesure où elle ne travaille pas par séries, sa pratique étant davantage dictée par une manière de naviguer entre différents éléments autobiographiques : des œuvres joyeusement colorées, représentant une enfance heureuse au milieu de sa famille, en côtoient d’autres marquées par une grande noirceur, évoquant les mois passés à se cacher, le choc de l’arrestation, les épisodes de violence et de brutalité vécus dans les camps, jusqu’à leur libération.
Pour ses dessins et ses peintures, C. Stojka travaille à la main comme au pinceau, par grands mouvements énergiques, sur du carton, du papier ou du papier cartonné, utilisant de l’acrylique ou de la peinture à l’huile, de la craie, du sable coloré, un stylo-bille, de l’encre ou des paillettes. Les scènes concentrationnaires sont généralement complétées de textes, incarnant la voix de sa mère ou la sienne, ou encore les injonctions des bourreaux. En souvenir de Bergen-Belsen, elle accompagne la signature de certains de ses tableaux d’un dessin de branche d’arbre, par exemple dans Personne n’avait vu cela… (1995) ou Là, il n’y avait pas de place pour les vivants (2005).
Son travail est montré au public pour la première fois en 1991, à l’Amerlinghaus à Vienne, et par la suite dans de nombreuses institutions, notamment au Mémorial de Ravensbrück (1996-1997) ou au Jüdisches Museum de Vienne (2004). Elle décède en 2013, après avoir fait paraître des essais de poésie, et son œuvre continue d’être présentée au sein d’expositions collectives et monographiques.