Caron Mathieu, “Sculpteur et femme : Félicie de Fauveau (1801-1886) et la transgression des genres”, Romantisme, n° 179, 2018, p. 58-69
→Waresquiel Emmanuel de, Félicie de Fauveau : portrait d’une artiste romantique, Paris, Robert Laffont, 2013
→Mascalchi, Félicie de Fauveau : una scultrice romantica da Parigi a Firenze, Florence, L.S. Olschki, 2012
Félicie de Fauveau et la Vendée, Les Lucs-sur-Boulogne, Historial de la Vendée, 2013
→Félicie de Fauveau : l’amazone de la sculpture, catalogue d’exposition, Les Lucs-sur-Boulogne, Historial de la Vendée, 15 février – 19 mai 2013, Paris, musée d’Orsay, 11 juin – 15 septembre 2013, Paris, Gallimard, Musée d’Orsay, 2013
Sculptrice et créatrice d’objets d’art décoratif française.
Issue d’une famille noble française, Félicie de Fauveau apprend la peinture auprès de Louis Hersent (1777-1860) avant de se consacrer à la sculpture, en autodidacte d’après son propre témoignage. Après la mort du père, la famille s’installe à Paris en 1827. Sa mère Anne-Hippolyte tient un salon influent dans le quartier de la Nouvelle Athènes, où l’atelier de F. de Fauveau voisine avec celui d’Ary Scheffer (1795-1858). Amie de Paul Delaroche (1797-1856), elle lit John Milton, Walter Scott, Lord Byron, et s’intéresse passionnément à l’histoire, à l’héraldique et à l’art médiéval.
F. de Fauveau obtient des commandes grâce à des parents proches de Charles X et à la protection de l’influent duc de Duras, dont la fille, la comtesse Félicie de La Rochejaquelein, devient son amie. Les « deux Félicie » entretiennent une relation fusionnelle qui, malgré leur éloignement, perdure jusqu’au décès de la comtesse en 1883. Bien avant Rosa Bonheur (1822-1899), F. de Fauveau ne se marie pas, se coupe les cheveux vers 1830 et emprunte souvent des pièces vestimentaires au costume masculin.
Pour subvenir à ses besoins, et sans doute poussée par une aspiration profonde, F. de Fauveau se professionnalise. Elle est la première sculptrice française à vivre de son art. À vingt-six ans, elle participe pour la première fois au Salon avec son relief Christine de Suède (1827), qui lui vaut une médaille d’or de deuxième classe et le succès pour ses œuvres historicisantes aux accents romantiques. Elle est sollicitée pour des portes destinées au Louvre et reçoit du comte James-Alexandre de Pourtalès la commande de la précieuse Lampe de saint Michel polychrome (1830) et du Monument à Dante (1830-1836).
En 1830, le cours de sa vie change lors de l’accession de Louis-Philippe Ier sur le trône : F. de Fauveau se range dans le camp des légitimistes et rejoint en 1831 la rébellion vendéenne avec la comtesse de La Rochejaquelein. Elle réalise des emblèmes pour ses compagnons et compagnes d’armes dans l’esprit chevaleresque du Moyen Âge. Arrêtée, elle est emprisonnée trois mois durant avant de reprendre brièvement les armes. L’« héroïne de la Vendée » est contrainte de s’exiler.
En 1833, l’artiste s’enfuit pour le pays qui l’a vue naître, la très catholique Italie, où elle réside jusqu’à la fin de sa vie malgré l’amnistie de 1837, fidèle à la duchesse de Berry et au comte de Chambord, dont elle réalise plusieurs portraits. À Florence, ses œuvres s’imprègnent de l’art du Moyen Âge et de la Renaissance italienne. Son frère Hippolyte de Fauveau (1804-1887) travaille dans son atelier, géré d’une main autoritaire. La « casa Fauveau » est fréquentée par une clientèle cosmopolite de riches aristocrates, russes notamment : la grande-duchesse Maria Nikolaevna, son père le tsar Nicolas Ier et le prince Anatole Demidoff.
Admiratrice de Benvenuto Cellini (1500-1571), F. de Fauveau se consacre à la sculpture comme aux arts décoratifs. Cette pluridisciplinarité désarçonne : en 1839, son Miroir de la Vanité, prisé par Théophile Gautier, est refusé au Salon pour son caractère hybride. Elle conçoit aussi bien des bustes et des bénitiers que des dagues d’apparat, des cadres de tableaux, des clochettes de table, des bijoux ou des pommeaux de canne fourmillant de détails, riches en symboles catholiques et en citations latines.
Tombée dans l’oubli, F. de Fauveau a été redécouverte grâce au travail considérable mené par l’historien de l’art Jacques de Caso, préalable à une exposition monographique au musée d’Orsay et à l’Historial de la Vendée en 2013. Le musée des Augustins de Toulouse possède plusieurs sculptures et le musée du Louvre a récemment acquis deux de ses chefs-d’œuvre, la Lampe de saint Michel (1830) et Sainte Réparate (1855).
Publication réalisée en partenariat avec le musée d’Orsay.
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