Sloan, Johanne, Joyce Wieland: Life & Work, Toronto, Art Canada Institute, 2014.
→Allen, Jan, Joyce Wieland: Twilit Record of Romantic Love, Kingston, Agnes Etherington Art Centre, Queen’s University, 1995.
→Wieland, Joyce, Véritable amour patriotique, Ottawa, National Gallery of Canada, 1971.
Joyce Wieland: Twilit Record of Romantic Love, Agnes Etherington Art Centre, Queen’s University, Kingston, Ontario, Canada, 18 décembre 1994 – 26 mars 1995.
→Joyce Wieland: Quilts, Paintings and Works on Paper, Canada House Cultural Centre Gallery, Londres, 12 juillet – 21 octobre 1988.
→True Patriot Love, National Gallery of Canada, Ottawa, 2 juillet – 8 août 1971.
Plasticienne et cinéaste canadienne.
Joyce Wieland est la fille d’immigrés anglais au Canada. Son enfance est marquée par la pauvreté et par la perte de ses parents. Lors de ses études secondaires, à la fin des années 1940, elle étudie avec la peintre Doris McCarthy (1910-2010), qui devient une influence forte et un modèle pour la jeune femme. Dans les années 1950, ses dessins et ses peintures sont des autoportraits ou représentation de couples intimement enlacés. Ils annoncent l’intérêt que l’artiste aura toute sa vie pour les thèmes de l’amour et de l’exploration de soi, par exemple dans Lady Examining Her Magic and Protective Circle (vers 1955), mais aussi son engagement constant dans la voie de la figuration, de l’imagination et de la narration. Dans les dernières décennies de sa vie, J. Wieland retourne à ces thèmes fondamentaux avec de délicats dessins au crayon de couleur, comme la série Bloom of Matter (1981), et avec des toiles très abouties : Artist on Fire (1983), Paint Phantom (1983-1984) et Menstrual Dance (1987). Cette dernière période, qui célèbre les relations entre humain et non-humain ainsi que l’émancipation féminine, a longtemps été ignorée des chercheuses et chercheurs ainsi que des curatrices et curateurs, éclipsée par les expérimentations radicales à l’œuvre dans ses films et ses quilts des années 1960 et 1970.
Ses travaux de dessin publicitaire dans les années 1950 représentent un tournant décisif pour J. Wieland. Elle devient l’amie d’un groupe de jeunes artistes partageant les mêmes idées, dont Michael Snow (1928-2023), qu’elle épouse en 1956 et dont elle divorce en 1982. En 1962, ils emménagent à New York, où ils vivent jusqu’en 1971. Avant cet emménagement, J. Wieland crée sa première série majeure de peintures, influencée par les mouvements internationaux de l’art abstrait, mais en faisant preuve d’une résistance à la peinture pure par l’inclusion d’éléments de collage, de griffonnages et de références à la culture populaire. Ces aspects témoignent de son inventivité et de son humour, ainsi que de son aisance formelle quant à la couleur et à la composition. Dans Heart On (1961), la toile non tendue, tachée de rouge, présente des cœurs découpés disposés de manière animée. Dans Laura Secord Saves Upper Canada (1961), un avion de papier en collage semble circuler autour du centre du tableau, référence anachronique à la résistance patriotique dont fit preuve cette jeune héroïne canadienne en 1812 face à l’invasion états-unienne dans la région du Niagara. L’amour de J. Wieland pour son pays s’exprime de la manière la plus évidente dans sa lithographie O Canada (1971), que l’artiste a produite en embrassant la pierre avec du rouge sur les lèvres tout en prononçant les paroles de l’hymne canadien. De manière audacieuse, elle met l’expérience des femmes au centre de son travail, tout en composant des images séduisantes qui lui sont propres. Plusieurs de ses œuvres sont acquises par des collections publiques et privées à cette époque.
New York renforce la conscience écologiste, politique et féministe de l’artiste. Sa pratique s’étend à l’assemblage, au film et à des suspensions créées à partir de matériaux plastiques, produites en 1966 et 1967, qui mettent au défi l’idée que l’art fonctionne de manière distincte de la politique et de la vie quotidienne. The Space of the Lama (1967) synthétise ces centres d’intérêt dans un quilt de plastique aux couleurs vives de format vertical, composé d’une bobine et d’un croissant de lune en tissu, de films 16 millimètres, ainsi que de photographies d’un « lever de Terre » et du filleul de l’artiste Munro Ferguson. Ces œuvres annoncent ses quilts textiles créés à la fin des années 1960 et au début des années 1970 pour son exposition rétrospective True Patriot Love à la National Gallery of Canada en 1971. Ce sont pourtant ses films expérimentaux, tels que Water Sark (1965) et Rat Life and Diet in North America (1968), qui instituent J. Wieland comme une figure clé du cinéma féministe. De retour au Canada, elle se concentre sur son long métrage The Far Shore (1976), une tragédie romantique rejetée à l’époque mais aujourd’hui considérée comme pionnière par les stratégies féministes radicales qui y sont mises en œuvre.
Au début des années 1990, J. Wieland est affaiblie par la maladie d’Alzheimer ; elle meurt en 1998. Son œuvre est représentée dans les collections du Museum of Modern Art (MoMA) à New York, de la Art Gallery of Ontario à Toronto et de la National Gallery of Canada à Ottawa, entre autres. Ses archives sont conservées à la York University et à la Cinémathèque québecoise. Ses films ont fait l’objet d’une rétrospective à Arsenal – Institut für Film und Videokunst à Berlin (Joyce Wieland, 2016) et ont été inclus dans les expositions Artist’s Choice : Yto Barrada – A Raft (MoMA, New York, 2021-2022) et No Master Territories (Haus der Kulturen der Welt, Berlin, 2022).
Une notice réalisée dans le cadre du programme de recherche « AWARE x Canada », en partenariat avec la Galerie de l’UQAM