Bach Valérie, Chariot Constantin, Alice Anderson, Geometric Dances, cat. exp., Galerie Valéry Bach, Bruxelles (10 septembre – 30 octobre 2021), Bruxelles, éditions de la Patinoire royale, 2021.
→Forde Kate (dir.), Alice Anderson: Memory Movement Memory Objects, cat. exp., Wellcome Collection, Londres (22 juillet – 18 octobre 2015), Londres, Wellcome collection, 2015
→Alice Anderson : DATA space, cat. exp., Espace culturel Louis Vuitton, Paris (5 juin – 20 septembre 2015), Paris, Espace culturel Louis Vuitton, 2015
Les Nommés du Prix Marcel Duchamp, Centre Pompidou, Paris, France, 6 octobre – 3 janvier 2020
→Alice Anderson: Memory Movement Memory Objects, Wellcome Collection, Londres, 22 juillet – 18 octobre 2015
→Alice Anderson : DATA space, Espace culturel Louis Vuitton, 5 juin – 20 septembre 2015
Sculptrice et plasticienne franco-britannique.
Diplômée de l’École des beaux-arts de Paris en 2001 et du Goldsmiths College de Londres en 2004. Alice Anderson a réalisé, jusqu’en 2009, des films courts qui constituaient un « journal », une recherche sur le fonctionnement de la mémoire. Pendant ces années, son interaction avec des « objets-sujets » a préparé sa pratique de sculpture, utilisant notamment du cuivre qu’elle a extrait pour la première fois du réveil de son atelier et qui représente pour elle la connectivité du monde numérique. La pratique d’Alice Anderson est avant tout performative. Les performances rituelles génèrent dessins au pastel, dessins de fil de fer et sculptures en acier Corten.
Le cuivre est le métal le plus anciennement utilisé par l’humanité. Les Romains l’appelaient aes cyprium (métal de Chypre), chalcos en grec, donnant ensuite le terme cuprum, d’où le mot anglais de copper. Le « métal rouge », en réalité rose, a fait la fortune des cultures minoenne, mycénienne et phénicienne. Il démontre des capacités remarquables de conductivité et de chaleur. Il résiste à la corrosion et demeure très malléable.
Il n’est donc pas anodin ni étonnant qu’Alice Anderson utilise ce noble métal, dont son usage brut est peu courant en art contemporain, à l’image de Carl Andre et Joseph Beuys. Toutefois, l’utilisation du cuivre est ici tout à fait différente. C’est à l’aide de bobines de fil qu’Alice Anderson crée des sculptures, des formes architecturales et des environnements, pour lesquels elle invite souvent le public à collaborer. Elle tisse les objets avec ce fil, jusqu’à une nouvelle forme derrière le métal. Cette attitude relève autant d’un processus, puisque le geste engage le corps des intervenants (Traveling Studio), que d’une qualification autre des objets, par l’entremise d’une transfiguration au cours des performances.
En effet, certaines formes sont reconnaissables sous les entrelacs du tissage : bouteille de coca, vélo, outils, téléphone, valise, canoë… jusqu’à la momification d’une voiture grandeur nature. Ce mode de captation ne consiste plus en une représentation par une image, mais se construit en la présentation de l’objet que l’artiste et les participants choisissent parmi les formes usuelles de la vie contemporaine. D’autres convoquent des structures géométriques abstraites, de la simple série (Floorboards Diagrams, Skylights par exemple) jusqu’à des agencements plus complexes : Cables, Lighting tracks, etc.
La série, en tant que motif artistique, est peu banale. Elle confère une dimension arithmétique à de simples formes. L’intérêt de la série renvoie à la phénoménologie, comme méthode de réduction (Husserl disait : « Aller à la chose elle-même ») et réside dans l’expérience pré-objective de la perception. Une forme géométrique quelconque, mais tangible, peut être considérée comme abstraite puisqu’elle engage le corps du spectateur. L’expérience de la perception garantit à l’objet, même abstrait, une pleine signification. Robert Morris rappelle que « Si l’œuvre doit être autonome, en ce sens que c’est une entité qui contient en elle la formation de la Gestalt — le tout indivisible et indissoluble —, en revanche, les termes esthétiques majeurs ne sont pas dans cet objet autonome, mais en dépendent : ils existent comme des variables indéterminées qui trouvent leur définition propre dans un espace spécifique et une lumière et selon le point de vue de l’observateur. » (« Notes on sculpture », revue Artforum, oct. 1966) La démarche minimale d’Alice Anderson sert cette façon rationnelle et conceptuelle de composition. Aussi ces œuvres sont-elles autant saisies par la lumière — sphère monumentale, escalier, arrangements de formes géométriques — que par le corps et permettent une capture de toutes les données du réel : espace, temps, matière, forme, volume, échelle.
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