Clemen Parrocchetti : Dévorer la vie, 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine, Metz, 14 Mars – 17 Août 2025
→The Unexpected Subject. 1978 Art and Feminism in Italy, FM Centre for Contemporary Art, Milan, 16 avril – 26 mai 2018
→Dalla creatività femminile come maternità-natura. Al controllo (controruolo) della natura avec le Groupe « Immagine » de Varese, La Biennale de Venise, 15 Juillet – 15 Août 1978
Plasticienne Italienne.
Clemen Parrocchetti étudie la peinture au milieu des années 50 à l’académie de Brera à Milan. Au cours des années 60, elle va questionner tout à la fois le milieu dont elle est issue – la bourgeoise lombarde – ainsi que les rôles assignés aux femmes dans la société italienne, soulignant l’absurdité du carcan social qui les enveloppe. Elle réalise son manifeste pour une culture des femmes en 1973 puis participe à différentes assemblées visant à remettre en question le patriarcat dans la société et dans le monde de l’art. En 1978, elle rejoint le collectif Immagine actif à Varese et, la même année, participe avec ses membres à la biennale de Venise. C’est dans ce contexte d’émulation collective qu’elle va pleinement déployer sa pratique, entre peinture, dessin, sculpture et installation.
Tout d’abord abstraites, ses peintures s’orientent progressivement vers des représentations à la fois grotesques et abstraites de la maternité – l’artiste s’est tournée vers l’art après la naissance de son quatrième enfant – ou des scènes de dévoration. Entre pulsion de vie et pulsion de mort, le séduisant et l’abject, C. Parrocchetti ouvre les représentations de la femme à de multiples facettes. Chenille ou Papillon, dévoreuse ou protectrice, la femme n’est pas juste féconde, elle est aussi monstrueuse. Sa chair déborde, se transforme et se superpose à celle de l’animal dans des autoportraits plus tardifs. La frontière entre les espèces devient parfois poreuse.
Tout en militant pour les droits des femmes, C. Parrocchetti transpose des combats du mouvement féministe – le droit à l’avortement ou les luttes contre les violences domestiques – dans ses représentations de l’anatomie féminine. Certains symboles récurrents dans ses œuvres dénoncent les limitations qui leur sont imposées. Dans Quattro righe affettuose per una sposa [Quatre lignes affectueuses pour une mariée], des jouets indiquent la voie à suivre pour devenir une ménagère parfaite. Dans Quattro tappe obbligate per un’apoteosi [Quatre étapes obligées vers l’apothéose] les seringues sont associées à la femme infirmière, l’enfant emmailloté à la mère, le seau et la serpillère à la ménagère, la fusette à la couturière – des perspectives réductrices entretenues par la religion catholique symbolisée ici par une croix. Son approche matérialiste du féminisme s’inscrit dans les réflexions du collectif Immagine, qui revisite les théories marxistes pour mettre en évidence que la femme doit se libérer du rôle auquel elle a été limitée : celui d’une machine à enfanter.
Dans les années 90, C. Parrocchetti s’intéresse à d’autres formes de vie, considérées comme secondaires. Au lieu d’envisager comme des ennemies les mites qui vont proliférer chez elle et consommer ses œuvres en textile, elle va les représenter comme des créatures complexes et résistantes. Des dessins représentant des poux, sauterelles, scorpions, cafards et autres insectes, les présentent, non plus comme des « nuisibles », mais comme des formes de vie puissantes. Chez elle, les femmes tout autant que les insectes ne sont plus des proies, mais aussi des prédateurs.rices, à l’image de ses sculptures de mites tenant leur proie en tissu, ou encore des bouches sur le point de crier ou dévorer dans ses peintures et ses tentures. La force, et parfois la violence des cycles de la nature – reliant naissance, dévoration et mort –, sont évoquées chez cette artiste dans toute leur ambivalence, soulignant la complexité intrinsèque de la condition féminine.
Une notice réalisée par AWARE : Archives of Women Artists, Research and Exhibitions en partenariat avec 49 Nord 6 Est Frac Lorraine.
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