Judy Watson, the names of places, Institute of Modern Art, Brisbane, 2016
Peintre australienne.
Formée à la gravure à l’université de Tasmanie, Judy Watson est aussi diplômée en 1986 de l’université Monash (Melbourne). En 1990, la découverte de ses racines aborigènes dans le nord-ouest du Queensland est un tournant dans sa vie. Dès lors, son travail s’inscrit dans une archéologie de la mémoire. Ses toiles naissent de la rencontre entre des matières aussi diverses que les laques, les encres, le pastel ou les pigments secs, et incluent parfois l’écorce d’eucalyptus, les coquillages ou les terres. Des effets inattendus en résultent : peu à peu, les couches transparentes, laquées ou plus épaisses s’accumulent sur la toile qui restera flottante sur le mur. Ce travail évoque le processus de la formation géologique de la terre, reflétant ainsi le « temps du rêve », présent immémorial à l’origine du monde physique et spirituel des Aborigènes. Sur ces fonds, l’artiste inscrit des formes humaines ou naturelles, qui semblent émerger de la matière, et font référence aux images ancestrales qui, gravées, frottées ou tracées sur la roche signalent les hauts lieux de l’histoire aborigène. Son œuvre est autant un travail sur la mémoire qu’une évocation du monde des femmes. Lauréate du prix Möet & Chandon, elle séjourne en France en 1995, et visite les collections des musées européens, poursuivant ainsi son travail d’inventaire des objets fabriqués par les femmes aborigènes.
De cette exploration sont nées les séries de gravures, Our Bones in Your Collections, Our Hairs in Your Collections (1997) : les objets y sont évoqués, parfois cachés sous des couches de papiers ou de laque ; cette dissimulation dénonce l’occultation de l’univers féminin par les musées, tout en révélant, comme les titres l’indiquent, l’appropriation par l’Occident de la culture aborigène. Son œuvre réalisée pour le musée du Quai Branly à Paris en 2006 relève de la même approche. J. Watson acquiert la reconnaissance internationale en 1997, à l’exposition Fluent, lors de la Biennale de Venise. Depuis, elle a participé à de nombreux projets monumentaux à Sydney ou Melbourne. Elle a aussi produit d’importantes séries de gravures, dont A Preponderance of Aboriginal Blood, (2005) qui évoque le passé des Aborigènes et leur lutte en faveur de la reconnaissance du droit de vote dans leur propre pays.