Schirmer Lothar, Bronfen Elisabeth, Women seeing women: a pictorial history of women’s photography in the 19th and 20th centuries from Julia Margaret Cameron to Ineez van Lamsweerde, Munich, Schirmer, 2020 (2nd éd.)
→Fry Roger Eliot, Woolf Virginia et Cameron Julia Margaret, Julia Margaret Cameron, Londres, Pallas Athene, 2016
→Cox Julian et Ford Colin, Julia Margaret Cameron: the complete photographs, Londres, Thames & Hudson, 2003
Victorian Giants: the Birth of Art Photography: Julia Margaret Cameron, Lewis Carroll, Clementina Hawarden, Oscar Rejlander, National portrait gallery, Londres, 1 mars – 20 mai 2018 ; Millennium gallery, Sheffield, 30 juin – 23 septembre 2018
→Julia Margaret Cameron: 19th century photographer of genius, the National Portrait Gallery, Londres, 6 février – 26 mai 2003 ; the National Museum of Photography, Film & Television, Bradford, 27 juin – 14 septembre 2003 ; the J. Paul Getty Museum, Los Angeles, 21octobre 2003 – 11 janvier 2004
→Julia Margaret Cameron: 1815-1879, John Hansard Gallery, University of Southampton, 8 février – 1 avril 1985
Photographe britannique.
Née à Calcutta d’un père agent de la Compagnie britannique des Indes orientales et d’une mère aristocrate française, Julia Margaret Pattle est en grande partie élevée à Versailles, chez sa grand-mère Thérèse de l’Étang. Elle a dix-neuf ans lorsqu’elle retourne vivre en Inde, où elle se marie en 1838 avec Charles Hay Cameron, un juriste et réformateur social anglais. En 1848, ce dernier à la retraite, le couple revient en Angleterre avec ses nombreux enfants (il en aura six et en adoptera presque autant).
J. M. Cameron a quarante-huit ans lorsqu’elle reçoit en 1863 sa première chambre photographique, un cadeau de la part de sa fille et de son gendre. Éminemment cultivée, elle nourrit très vite de hautes ambitions, celles d’élever le médium au rang des beaux-arts en « combinant réel et Idéal » et en vouant une « dévotion totale à la poésie et à la beauté ». Cette conception est en partie l’héritage des années de fréquentation de « Little Holland House », résidence de sa sœur Sara Pinsep, laquelle en avait fait dans les années 1850 le siège de l’un des salons littéraires et artistiques les plus en vue de Londres. Le peintre George Frederic Watts (1817-1904), qui y avait son atelier, et les poètes Henry Taylor et Alfred, Lord Tennyson, qui en étaient des habitués, comptaient parmi les intimes de J. M. Cameron. Amie de maintes personnalités de l’intelligentsia victorienne, cette dernière devait d’ailleurs s’imposer en tant qu’artiste avant tout par son talent à portraiturer les hommes illustres de son époque, parmi lesquels les scientifiques sir John Herschel et Charles Darwin ou l’historien Thomas Carlyle.
En dehors de Julia Jackson, nièce et filleule de la photographe – et future mère de l’écrivaine Virginia Woolf et de la peintre Vanessa Bell (1879-1961) –, peu de femmes ont en revanche le privilège de rester elles-mêmes devant l’objectif. Recrutés dans son cercle familial et amical, mais aussi parmi ses employées ou d’autres habitantes de l’île de Wight où elle réside, les modèles féminins de Cameron, comme d’ailleurs les enfants, prêtent surtout leurs traits à des personnages littéraires, mythologiques ou religieux, aussi bien dans des études de figures que dans des tableaux vivants photographiés.
Très consciente de son talent, la photographe revendique une conception éminemment libre du médium, traduite dans une esthétique très personnelle et originale. Expressivité du flou et de l’éclairage, audace des plan rapprochés, caractère assumé des coulures, éraflures et autres traces de la dimension manuelle et expérimentale du processus créatif… : pour être en rupture avec les conventions photographiques de son temps, son style, immédiatement reconnaissable, lui vaut d’être raillée autant qu’encensée tout au long de sa courte carrière, une décennie rythmée par une véritable fièvre créatrice.
Celle-ci se dissipe rapidement après 1875, date d’un départ pour Ceylan (Sri Lanka) où le couple Cameron s’installe afin de se rapprocher de ses enfants et de la gestion des plantations familiales de café. L’œuvre de la photographe contient alors près de mille deux cents images, démultipliées en milliers de tirages aux sels d’argent, particulièrement vulnérables aux ravages du temps. Avant de quitter l’Angleterre, elle avait sélectionné soixante-dix photographies destinées à être reproduites par le procédé au charbon censé assurer, par son inaltérabilité, la préservation et la diffusion de ce qu’elle considérait comme le meilleur de son œuvre. Dès le tournant des XIXe et XXe siècles, J. M. Cameron sera reconnue dans la sphère anglophone comme l’une des figures tutélaires de l’art photographique. Elle figure aujourd’hui parmi les photographes du XIXe siècle ayant suscité le plus d’expositions monographiques.
Publication réalisée en partenariat avec le musée d’Orsay.
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