Hardouin-Fugier Elisabeth et Grafe Etienne, Les Peintres de fleurs en France : de Redouté à Redon, Paris, Les Editions de l’amateur, 2003.
→Bumpus Bernard, « Eléonore Escallier » dans Gaze Delia (dir.), Women artists, t. I, Londres / Chicago, Fitzroy Dearborn, 1997, p. 501-503.
→L’Art en France sous le Second Empire, cat. d’exp., Grand Palais, Paris, 1979.
Rétrospective, Manufacture nationale de Sèvres, Sèvres, 1888.
Peintre et céramiste française.
Fille d’un propriétaire et d’une rentière, Éléonore Légerot épouse en 1846 le négociant Pierre-Joseph-Augustin Escallier. Elle se forme à Dijon auprès du peintre et céramiste Jules-Claude Ziegler (1804-1856) et débute au Salon en 1857 avec Le Vase de fleurs et Les Iris. Jusqu’en 1880, elle y expose régulièrement des natures mortes, des représentations de fleurs, de fruits (Pêches et raisins du Jura en 1872) et d’animaux (Un faisan en 1864), une figure (La Jeune Fille au poisson en 1865) ainsi que des panneaux décoratifs (L’Étang et Le Jardin en 1861).
En 1858, elle se porte candidate au poste de directrice de l’école de dessin pour les femmes que projette de créer la Société des amis des arts de Dijon. Par la suite, elle enseigne les fleurs et la décoration à l’École impériale de jeunes filles. Sa fille Marguerite (1854-1945), qui est aussi son élève, expose au Salon à partir de 1877. En 1860, E. Escallier reçoit une médaille d’argent à l’Exposition de Troyes. En 1862, elle est invitée à exposer au Salon des amis des arts de Besançon et, en 1869, au Salon de la Société des amis des arts de Bordeaux. Si sa spécialité est les fleurs et les fruits, elle réalise également quelques portraits à cette époque (Portrait de Marie Feuvrier à vingt-quatre ans et Portrait de Madame Dugné, née Paffeney, à vingt ans, musée des Beaux-Arts de Dole).
Dans les années 1860 et jusqu’au début des années 1870, elle travaille dans l’atelier de faïencerie d’art de Théodore Deck (1823-1891). Inspirées par le japonisme, les œuvres qu’elle présente à l’Exposition universelle de 1867 dans le cadre de la manufacture Deck sont acquises par le musée des Arts décoratifs et le South Kensington Museum, actuel Victoria & Albert Museum, à Londres. Le plat de faïence fine Perroquet sur une branche de cerisier réalisé en 1871 atteste encore de cette collaboration.
La vie d’E. Escallier est marquée par une quête de reconnaissance et par la volonté de vivre de son art. En 1863, elle expose son autoportrait au Salon. Dans cette œuvre, elle se représente au travail, peignant un vase et entourée de fleurs. En 1865 puis en 1866, elle écrit au comte de Nieuwerkerke, intendant des beaux-arts de la Maison de l’empereur, pour lui demander une reconnaissance officielle de son travail et des acquisitions lui permettant de subvenir à ses besoins : « [C]haque année, bien que le succès se fasse longtemps espérer, je lutte contre tout découragement et j’envoie des œuvres sérieuses dans lesquelles je n’épargne aucun effort pour mériter l’attention du jury et ses récompenses officielles. » Elle insiste sur le fait que sa famille vit grâce à ses revenus. Deux tableaux, Fleurs et Vase de fleurs, sont ainsi acquis et déposés aux musées de Saint-Étienne et de Lons-le-Saunier. Une troisième œuvre, Les Chrysanthèmes, est acquise en 1869 puis, en 1872, Pêches et raisin du Jura. Le 1er mai 1869, La Revue des deux mondes lui dédie un article : « Mme Éléonore Escallier, très longtemps inconnue ou méconnue, se révèle par un succès. Elle a l’éclat, elle a la grâce, elle a la facture large et puissante, et par-dessus tout le reste elle […] dessine une fleur comme une figure, en artiste classique et en digne élève de Ziegler. » Le 12 avril 1872, Louis Enault écrit dans Le Constitutionnel : « Mme Escallier est la reine des fleurs. »
À la suite de la médaille d’honneur qu’elle reçoit au Salon de 1868 pour deux faïences intitulées Fleurs et oiseaux, elle propose ses services à la Manufacture impériale de Sèvres, insiste sur son expérience, sur sa réputation et sur sa récente reconnaissance. Après une première réponse négative, elle renouvelle sa proposition en 1871 et, en 1874, soutenue par T. Deck, devenu membre de la commission de perfectionnement de Sèvres, et par Jules Champfleury, chef des collections de la Manufacture, elle devient peintre à la Manufacture. Elle crée des modèles et apprend de nouvelles techniques, notamment celles de la porcelaine dure et du pâte-sur-pâte. Le Vase de la Ville de Paris présenté à l’Exposition universelle de 1878 puis au ministère des Affaires étrangères connaît un grand succès. En 1885, elle reçoit la médaille d’or à l’Exposition universelle d’Anvers.
E. Escallier répond à une première commande de l’État en 1874 et réalise, pour les Salons de l’Aurore et des musées du palais de la Légion d’honneur, six dessus-de-porte représentant des fleurs et des emblèmes. L’inspiration rococo qui s’y lit montre qu’elle s’adapte au lieu. Une seconde commande arrive en 1878 pour un carton décoratif, Le Printemps, achevé en 1880 et réalisé en tapisserie par la Manufacture nationale de Beauvais pour le grand escalier du palais du Luxembourg. Cette œuvre est finalement attribuée à l’ambassade de France à Berlin en 1887.
À sa mort, en 1888, une rétrospective de ses œuvres est organisée à la Manufacture de Sèvres : « L’administration a voulu ainsi rendre hommage à une artiste sans cesse en quête de lignes et d’ornements décoratifs d’un effet nouveau » (Le Temps, 16 septembre 1888). Le critique Arsène Alexandre écrit alors : « Voici une femme, une artiste pour de vrai, qui se met à la décoration, et du premier coup ses essais se distinguent au milieu des travaux des ouvriers. Comparez un peu à Sèvres les quelques vases de Mme Escalier [sic] avec la moyenne des autres, et vous trouverez d’un côté l’originalité et la grâce, de l’autre, la sécheresse et la froideur » (« La semaine artistique », Paris, 1er août 1888).
Publication réalisée en partenariat avec le musée d’Orsay.
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