Patricia Gadea est une peintre liée au mouvement culturel de la Movida madrilène. Son travail révèle, à travers la peinture, le collage et la performance, les contradictions du processus de modernisation culturelle après la fin de la dictature franquiste en Espagne (1975).
P. Gadea étudie à l’école Estilo de Madrid, où elle a ses premiers contacts avec l’expression artistique. Entre 1977 et 1978, elle suit des cours de dessin à l’académie Artium Peña. C’est là qu’elle rencontre Juan Ugalde (1958-), qui devient son compagnon. Un an plus tard, ils entrent tous deux à la Real Academia de Bellas Artes de San Fernando, également à Madrid.
En 1979, ils organisent leur première exposition à l’Academia avec un groupe d’étudiants, Comida-homenaje a Napoleón [Déjeuner-hommage à Napoléon], dans laquelle chaque participant expose plusieurs affiches. Il s’agit d’une intervention spontanée qui remet en question le caractère académique de San Fernando, hermétique aux tendances artistiques internationales. À partir de cette année-là, P. Gadea et J. Ugalde visitent différentes capitales européennes où ils se familiarisent avec des mouvements contre-culturels tels que le punk.
La carrière de P. Gadea connaît un essor rapide. En 1985, avec d’autres artistes, elle dirige l’occupation d’un passage souterrain de la capitale, le transformant pendant quelques heures en une galerie d’art qu’ils appellent « Mary Boom », en référence à la célèbre galerie new-yorkaise Mary Boone. En 1986, elle reçoit une bourse Fulbright pour poursuivre sa carrière à New York, où elle s’installe avec J. Ugalde. Ils y rencontrent le poète et artiste Dionisio Cañas (1949-), avec lequel ils commencent à fréquenter le McCarthy’s Bar, représenté par P. Gadea dans une peinture du même nom (1987). Au cours de ces années, l’artiste collabore avec D. Cañas dans le cadre de performances et d’interventions, et expose dans des lieux tels que le Baruch College (1987) et la Fashion Moda Gallery (1988). En 1987, elle est sélectionnée pour exposer à l’Institute of Contemporary Art de Londres.

En 1989, P. Gadea, D. Cañas et J. Ugalde retournent à Madrid, où ils créent le collectif de pop art politique Estrujenbank avec l’artiste Mariano Lozano (1942-2021). Le groupe installe dans son atelier une salle d’exposition du même nom et s’intègre à la scène artistique alternative de la ville.

Les années 1990 marquent un tournant dans sa carrière : en 1992, Estrujenbank se dissout et elle se sépare de J. Ugalde. Au cours de ces années, elle développe la série Circo [Cirque], dans laquelle elle critique le paysage politique espagnol et son émulation de la liberté en termes de marché et de spectacle. En 1994, elle participe à l’exposition Cocido y crudo [Cuit et cru] au Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía, très bien reçue à l’époque. Cependant, à la fin de la décennie, elle abandonne sa carrière et entre dans un centre de désintoxication.

En 2006, elle est retrouvée morte dans son appartement. J. Ugalde se charge de localiser ses œuvres, dispersées et égarées dans tout le pays. Le Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía lui consacre une exposition monographique en 2014-2015. Ses œuvres font partie de collections de cette dernière institution, du musée Guggenheim de Bilbao et de la Fundación La Caixa.