Peintre bosnienne.
Née d’un père originaire de Serbie et d’une mère descendant d’une vieille famille serbe de Bosnie, Mileva Todorović s’inscrit à l’Académie des beaux-arts de Zagreb, seule institution du genre dans les années 1920 dans le royaume yougoslave. Elle était la seule femme dans la classe du grand peintre croate Ljubo Babić. À Zagreb, elle participa aux réunions et débats du groupe Zemlja (« le pays ») constitué de peintres, sculpteurs et architectes croates progressistes et socialement engagés et influencés par les futuristes, les constructivistes, les dadaïstes et le mouvement Bauhaus, comme Krsto Hegedušić, Marijan Detoni, Frano Krsinić ou Anton Augustinćić. Elle exposa régulièrement avec le groupe Zemlja, tout en s’interrogeant sur l’esprit rebelle de ses collègues et en développant une vision plus intimiste et personnelle de son art. De retour à Sarajevo en 1937, elle produisit une série de 11 dessins satiriques, sorte de commentaire des événements politiques mondiaux. L’artiste rejoignit le groupe Collegium artisticum, dont les membres étaient des peintres de gauche, proches du parti communiste yougoslave, parmi lesquels Roman Petrović, Vojo Dimitrijević, Ismet Mujezinović ou encore Daniel Ozmo. Le groupe organisa sa dernière exposition en 1941.
En 1942, alors qu’elle travaillait sur les illustrations du Faust de Goethe, M. Todorović fut arrêtée par les nazis et déportée au camp de concentration de Stara Gradiska, en Croatie. Grâce à sa connaissance de l’allemand, elle fut envoyée dans des camps de travail en Allemagne et en Autriche, puis échangée en 1943. De retour à Belgrade, elle vécut cachée jusqu’à la libération où elle fut le seul peintre de Belgrade à répondre à l’appel de la Commission d’État pour les crimes de guerre, témoignant par son œuvre des atrocités de la terreur oustachie contre les prisonniers des camps de Jasenovac et Gradiska. Elle produisit une série de dix dessins émouvants de corps de victimes des camps flottant dans la Sava. Rentrée à Sarajevo fin 1945, M. Todorović passa par une période de réalisme engagé, en mettant l’accent sur la femme ouvrière. À partir des années 1960, elle abandonna la thématique de la guerre pour se tourner vers une poétique intimiste. Elle peignit des natures mortes et des sujets de la vie quotidienne, dans des tons lyriques et mélancoliques. M. Todorović réalisa la plupart de ses 300 tableaux et 100 dessins au cours des quarante dernières années de sa vie. Première femme à entrer à l’Académie des sciences et des arts de Bosnie-Herzégovine, elle est considérée comme un des grands peintres de l’ex-Yougoslavie.