Exposition Tamako Kataoka, à l’occasion des 110 ans de sa naissance, cat. exp., Musée national d’art moderne de Tokyo (MOMAT), avril-mai 2015, Tokyo, Nikkei Inc., 2015
→Toshio Yamanshi (dir.), Kataoka Tamako Gashū [Kataoka Tamako Art Collection]. Kyoto: Maria Shobo, 2009.
→Toshio Yamanashi, Kataoka Tamako Gashū [Recueil d’œuvres de Tamako Kataoka], 2 vol., Tokyo, Kyūryūdō, 1992
Exposition Tamako Kataoka, à l’occasion des 110 ans de sa naissance, Musée national d’art moderne de Tokyo (MOMAT), avril-mai 2015 ; Musée des beaux-arts d’Aichi, juin-juillet 2015.
→Exposition Tamako Kataoka, à l’occasion du 20e anniversaire du Sapporo Art Park, Sapporo Art Park, avril-mai 2010
→Exposition Tamako Kataoka, Légende du nihonga contemporain, à l’occasion des 100 ans de l’artiste, Musée d’art moderne de Kanagawa, avril-juin 2005
Peintre de nihonga japonaise.
Fille aînée d’une fratrie de huit enfants, Tamako Kataoka naît le 5 janvier 1905 à Sapporo, sur l’île septentrionale de Hokkaidō. Aspirant à devenir médecin, élève studieuse, elle intègre la filière d’excellence de préparation à l’enseignement du lycée public pour jeunes filles de sa ville natale. Mais une fois son diplôme du secondaire en poche, des réflexions échangées avec une amie déclenchent chez elle l’envie de changer de voie et de devenir peintre. Elle décide alors de monter à Tokyo et de s’inscrire à l’École des arts pour jeunes filles (actuelle université Joshibi). Parallèlement, elle se forme auprès de Tadao Yoshimura (1898-1952), peintre de style japonais (nihonga) qui expose notamment dans les salons officiels.
Une fois ses études terminées, en 1926, et après avoir décliné le mariage arrangé que lui proposaient ses parents, T. Kataoka accepte un poste d’institutrice dans l’école primaire d’Ooka, à Yokohama. Faisant fi de l’avis de son maître T. Yoshimura, qui ne l’y a pas autorisée, elle tente d’exposer au Salon mais essuie des refus à plusieurs reprises. Sa rencontre inopinée avec Kiyoshi Nakajima (1899-1989), un peintre de nihonga qui habite non loin de chez elle, lui ouvre de nouveaux horizons. Actif au sein du Nihon Bijutsuin [Institut des arts du Japon], K. Nakajima l’encourage à participer aux biennales – dites Inten – de cette organisation indépendante centrée sur le nihonga, dont les expositions sont concurrentes du Salon officiel. Suivant ses conseils, elle se met à peindre dans cette optique.
En 1930, la jeune artiste y est admise pour la première fois lors de 17e édition d’automne avec Biwa [Nèfles, 1930, Hokkaidō, musée d’Art moderne]. En 1933, Manabu Kora [Fillettes studieuses, 1933, Hokkaidō, musée d’Art moderne], qui prend pour modèles ses propres élèves, lui ouvre de nouveau les portes du Inten – mais, par la suite, ses œuvres sont refusées pendant plusieurs années consécutives, au point qu’on ironise sur son sort en la surnommant « la déesse du refus ». Il faut attendre 1946 pour que T. Kataoka soit enfin réadmise de façon continue, pour être finalement promue en 1952 au rang de dōjin [associée], titre conféré sur recommandation aux membres éminent·e·s du Nihon Bijutsuin.
En 1955, invitée à enseigner le nihonga dans son alma mater, l’École des arts pour jeunes filles, elle décide de quitter son poste d’institutrice après près de trente ans de bons et loyaux services. Sa première exposition individuelle, Peintures nihonga de Tamako Kataoka, est organisée en 1959. Cela correspond à l’époque où la peintre s’intéresse aux arts traditionnels de la scène, comme le théâtre kabuki, le théâtre nô ou la musique chorégraphiée gagaku, qu’elle fait apparaître dans son œuvre. Gensō [Fantaisie, 1961, Kanagawa, musée d’Art moderne], qui représente deux danseurs jouant chacun une pièce du répertoire du gagaku – Ranyōō et Genjōku –, est récompensé par le prix du ministre de l’Éducation au salon Inten.
À partir des années 1960, T. Kataoka s’intéresse aux volcans, sujet qu’elle découvre en dessinant d’après nature des calderas de Hokkaidō. Le mont Fuji devient alors un de ses motifs de prédilection. En 1966, elle rejoint le corps enseignant de la toute nouvelle Université des beaux-arts d’Aichi en tant que responsable de la section de nihonga. Ceux et celles qui s’intéressent à l’art de T. Kataoka ne peuvent passer sous silence la série qu’elle commence cette même année, à savoir les fameux Tsuragamae [Physionomies], véritable galerie de portraits de personnages historiques. L’artiste étudie en profondeur ces figures pour les réinterpréter à sa façon et les faire revivre dans des attitudes contemporaines.
Les grands maîtres des estampes ukiyo-e forment une grande partie de ces Tsurugamae, le premier étant le portrait de Hokusai (1760-1849) sous le titre Tsurugamae : Katsushika Hokusai (1971, Kanagawa, musée d’Art moderne]. T. Kataoka explique qu’elle a une profonde admiration pour les maîtres de l’ukiyo-e, qui ont eu une grande influence sur les arts en Occident mais qui avant tout dessinaient pour plaire au grand public d’Edo en toute liberté, sans se soumettre à la volonté des puissants : les peindre constitue pour elle une forme de réflexion sur son art. Pas moins de trente-neuf portraits de la série Tsurugamae sont exposés dans les salons Inten, un exercice qu’elle poursuit jusqu’à ses quatre-vingt-dix-neuf ans. En 1979, la galerie Matsuya de Ginza, à Tokyo, organise la première rétrospective de l’artiste, intitulée Tamako Kataoka : saisissante représentation de la psychologie humaine.
En 1983, T. Kataoka réalise son premier nu féminin, Pose 1 (1983, Sapporo Art Park), un genre qu’elle continue à illustrer jusqu’à ses cent ans en passant contrat avec des modèles, désireuse d’explorer les volumes du corps et l’équilibre dynamique qui s’instaure entre les différentes parties de l’anatomie. La dernière œuvre qu’elle expose au salon Inten est justement un nu, Pose 23 (2005, Sapporo Art Park).
L’œuvre de T. Kataoka se caractérise par des formes audacieuses, des couleurs vives et une touche puissante – autant de traits qui rendent sa peinture spectaculaire et saisissante. D’un esprit indépendant qui ne se laisse pas enfermer dans les conventions, elle poursuit sans cesse son apprentissage de la peinture, s’attaquant à une grande variété de thèmes pendant ses quatre-vingts ans de carrière pour progresser, faisant preuve d’une vitalité inégalée tout au long de sa vie, qui prend fin le 16 janvier 2008, à l’âge de cent trois ans.
Une notice réalisée dans le cadre du programme « Artistes femmes au Japon : XIXème – XXIème siècle »
© Archives of Women Artists, Research and Exhibitions, 2024