Prix AWARE

Julie Béna
Nommée au Prix 2018

© Margot Montigny

Le travail de Julie Béna est marqué par son histoire. Elle passe son enfance dans un théâtre itinérant, sera elle-même comédienne à l’adolescence. Son univers s’appuie sur le théâtre, l’Antiquité, la mythologie, la littérature, la vie nocturne. Il se compose de scenarii, de héros romanesques et épiques, de décors plantés, et tourne depuis près de cinq années autour d’une figure fictive : Rose Pantoponne.

Julie Béna - AWARE Artistes femmes / women artists

Julie Béna, vue de l’exposition Julie decided to try growing watermelons, 2017, céramique, cuivre, métal, Plexiglas, Courtesy Julie Béna & Galerie Joseph Tang, © Galerie Joseph Tang

Comme tout, chez Julie Béna, le personnage de Rose se définit par rapport à son lieu d’existence et aux gens qui l’entourent. À l’origine, Rose Pantoponne apparaît dans les derniers chapitres du Festin nu à travers les divagations de l’esprit d’un vieux camé : « Z’avez pas vu Rose Pantoponne ? » Have You Seen Pantopon Rose ? (2017) s’est construit à partir de cette apparition échappée du texte de William S. Burroughs vers l’incarnation de Rose. Parallèlement au fameux roman de la beat generation, l’artiste entame la lecture de l’Odyssée d’Homère et se replonge dans la tragédie grecque. Pour elle, c’est un peu comme si Jack et Neal, deux protagonistes de Sur la route de Jack Kerouac, avaient croisé Homère. Ou comment la beat generation rencontre le tragique antique.

Have You Seen Pantopon Rose ? conjugue la revue de cabaret avec la performance et la comédie musicale. Rose Pantoponne n’est pas un patchwork mais plutôt un cocktail surprenant, salé-sucré, doux-amer. La recette s’écrit au fur et à mesure. Des éléments viennent s’ajouter, se mêler pour sans cesse complexifier le goût et allonger le temps en bouche.

Julie Béna - AWARE Artistes femmes / women artists

Julie Béna, Have you seen Pantopon Rose? The one woman show, 2017, film, 35’, Courtesy Julie Béna, © Julie Béna & we areghosthouse

L’histoire de Have You Seen Pantopon Rose ? est composée d’objets, de textes, de gestes, de musiques que suivent deux entités : Rose Pantoponne et le Chœur. Le Chœur, c’est la parole principale, explicative, celle qui donne le la. Rose Pantoponne, personnage quasi muet incarné par l’artiste elle-même, ce sont les gestes, les manipulations, les cocktails, la danse.

Et son existence d’être vécue, performée et vue à mesure des pérégrinations de son autrice. On la rencontrera ainsi à Londres, Montréal, New York, Los Angeles et, plus récemment, à Brest pour son dernier opus en date.

Car il était temps pour Julie Béna de réunir tant d’expériences et une telle épopée en un lieu. Pour l’occasion, elle a produit un film dans lequel Rose va se dévoiler par les mots, la danse et la musique. Le film s’accompagne d’un corpus de sculptures qui entrent en dialogue. Ni environnement ni, encore moins, décor du film, les pièces participent de l’histoire un temps pour mieux s’en détacher plus tard. Elles sont à Rose Pantoponne ce que le lion peureux et l’homme de fer blanc sont à Dorothy dans Le Magicien d’Oz, des compagnons de route qui continueront sans elle.

 

Julie Béna (1982, France) travaille sur des environnements qui s’inspirent du monde de la littérature, du cinéma, du théâtre et de la culture populaire. Diplômée en 2007 de la Villa Arson (Nice), passée par la Gerrit Rietveld Academie à Amsterdam, elle a rejoint en 2012-2013 le programme du laboratoire de création du palais de Tokyo. Entre 2012 et 2016, on la retrouve à la Fonderie Darling (Montréal), au Futura Project (Prague), à l’International Studio & Curatorial Program (ISCP, New York), au Fahrenheit de la Flax Foundation (Los Angeles) ou au Rupert (Vilnius). En 2011, elle a participé au Salon de Montrouge. Depuis, ses performances et ses travaux ont été montrés en divers lieux, en France et à l’étranger : ICA (Londres), Performa (New York), palais de Tokyo, Kadist Foundation (San Francisco), Syntax (Lisbonne), IAC (Villeurbanne), Mendes Wood DM (São Paulo), Passerelle centre d’art contemporain (Brest).

Rapporteur : Étienne Bernard, directeur de Passerelle centre d’art contemporain à Brest

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