De la Haye Amy, Pel Martin, Gluck : Art and Identity, cat. exp., Brighton Museum, Brighton [18 novembre 2017 – 11 mars 2018], New Haven, Yale University Press, 2017
→Michalska Magda, « Gluck and Her No Prefix, No Suffix Queer Art », Daily Art Magazine, 21 février 2018
→Souhami Siana, Gluck, 1895-1978: Her Biography, Londres, Phoenix, 2001
Gluck, The Fine Art Society, Londres, 6 – 28 février 2017
→Gluck : Art and Identity, Brighton Museum, Brighton,18 novembre 2017 – 11 mars 2018
Peintre britannique.
Issu·e d’une riche famille juive dont le père a fondé l’empire de la restauration et de l’hôtellerie J. Lyons & Co, l’artiste sera dépendant·e financièrement de ce dernier tout au long de sa vie, ce qui entrera parfois en contradiction avec son désir de rébellion. De 1913 à 1916, iel étudie à la St. John Wood School of Art à Londres, contre l’avis de ses parents, défavorables à ce qu’iel suive un enseignement artistique. Iel part ensuite s’installer à Lamorna, en Cornouailles, avec son amante rencontrée à l’école, E. M. Craig, où iels découvrent ensemble la Newlon School, une association d’artistes qui, dans un élan proche de celui de l’école de Barbizon en France, prônent la peinture en plein air, appréciant la lumière et la diversité des paysages. C’est à cette période que l’artiste défie les conventions sociales et assume son expression de genre fluide en s’habillant exclusivement avec des vêtements supposés masculins. Né·e Hannah Gluckstein, iel abandonne rapidement son nom de naissance pour devenir « Gluck », sans « préfixe, suffixe ou guillemets ». En outre, déterminé·e à ne pas faire de concession, lorsque la Fine Art Society de Londres l’identifie comme « Miss Gluck » sur un document officiel, iel démissionne.
Au cours des années 1920, iel fréquente la journaliste et écrivaine mondaine Sybil Cookson, et vit alors entre Londres et la Cornouailles. Au cours de cette décennie, sa peinture rend compte tant de la quiétude de la campagne britannique que de la folie des cabarets de la capitale, et laisse à imaginer la vie nocturne lesbienne et cosmopolite de l’entre-deux-guerres. Ce double intérêt transparaît d’ailleurs à travers sa première exposition personnelle, Stage & Country, en 1926 à la Fine Art Society.
En 1932, Gluck rencontre la fleuriste et décoratrice Constance Spry, dont l’activité influence considérablement son travail. Inspiré·e par les bouquets de sa compagne, iel peint des natures mortes et des compositions florales à forte connotation sexuelle. Sa notoriété croît – iel trouve son public. La clientèle de C. Spry se met à collectionner ses toiles. C’est également à cette époque que l’artiste développe et fait breveter le « cadre Gluck » : pensé comme un cadre à trois niveaux, celui-ci a vocation à se fondre dans l’architecture d’accueil de l’œuvre exposée. En 1936, iel quitte C. Spry et entame une relation passionnée avec la philanthrope et artiste – à l’époque mariée – Nesta Obermer (1893-1984). L’année suivante, iel peint Medaillon (1936), représentant les deux amant·e·s de profil. Leur proximité physique évoque une fusion des deux êtres. Cette toile deviendra rapidement une œuvre iconique de la culture visuelle lesbienne et du travail de Gluck en général.
Profondément marqué·e par cette relation, l’artiste tombe dans une dépression lorsque N. Obermer y met un terme en 1944. Iel s’isole de ses proches et détruit certains de ses tableaux. S’ensuivent une trentaine d’années sans que l’artiste ne produise réellement ou n’expose. Pour autant, iel milite sans relâche pour une amélioration qualitative du matériel de production des artistes peintres auprès des fabricants et du British Board Trade, et obtient finalement gain de cause. Gluck retrouve une certaine fièvre créatrice dans les années 1970. De 1970 à 1973, iel réalise Credo: Rage, Rage against the Dying of the Light, une sorte d’épitaphe très personnelle représentant un poisson échoué en décomposition. L’œuvre sera montrée lors d’une exposition rétrospective et posthume à la Fine Art Society en 1981.
Son œuvre fut redécouverte et montrée au public ces dernières années, notamment lors de l’exposition collective Queer British Art 1861–1967 à la Tate Modern de Londres (2017) et à l’occasion de deux expositions monographiques : Gluck: Art and Identity au Brighton Museum and Art Gallery (2017) et Gluck à la Fine Art Society (2017).