Voigt Eberhard, « Wang, Gongyi », dans Beyer Andreas, Savoy Bénedicte et Tegethoff Wolf, Allgemeines Künstlerlexikon : die Bildenden Künstler aller Zeiten und Völker [Lexique général des artistes : les artistes plasticiens de tous les temps et de tous les peuples], Berlin, Boston, Walter de Gruyter, vol. 114, 2022
→Wang Gongyi : encres situations, cat. exp., Cité du livre, Aix-en-Provence [9 février – 5 mars 1994], Institut Français, Tétouan [1994], Aix-en-Provence, Cité du livre, 1994
Wang Gongyi, Galerie du monde, Hong Kong, 13 avril – 4 juin 2022
→Multitudes, Chambers Fine Art, New York, 6 mai – 18 juin 2021
→Winsor Blue, Chambers Fine Art, New York, 17 novembre 2018 – 19 janvier 2019
Plasticienne chinoise.
Wang Gongyi (王公懿) vit et travaille aux États-Unis, plus précisément à Portland (Oregon). Après les tumultes de la Révolution culturelle, durant laquelle, comme de nombreux jeunes gens, elle est envoyée travailler à la campagne, Wang G. étudie à l’Académie centrale des beaux-arts de Chine à Beijing dont elle est diplômée en 1978. Une fois diplômée, elle exerce un temps dans une maison d’édition de beaux-arts à Tientsin. En 1978, Wang G. est admise au sein du département des Arts d’impression de ce qui s’appelle alors l’Académie des beaux-arts du Zhejiang de Hangzhou. Deux ans plus tard, elle obtient sa maîtrise et reste à l’académie pour enseigner. Elle entame alors une longue carrière d’artiste. Elle devient la première femme à recevoir le premier prix de l’Exposition nationale d’art de la jeunesse lors de sa deuxième édition avec sa série d’estampes en noir et blanc Qiu Jin, qui rend hommage à cette héroïne révolutionnaire et martyre chinoise du XIXe siècle. Ces gravures se trouvent aujourd’hui au musée d’Art contemporain de l’Académie des arts de Chine à Hangzhou ; elles sont considérées comme une œuvre importante de Wang G., applaudie pour son sujet et pour sa volonté d’appeler à la réforme sociale et à la révolution.
L’estampe Jié dǎng [Fonder un parti, 1979] de cette série est apparue dans le cadre de l’exposition From Palace to Studio : Chinese Women Artists 1900 to the Present (2015) à l’Ashmolean Museum d’Oxford, sous le titre Establishing a Revolutionary Party. Selon certaines analyses, ses gravures sur bois seraient influencées par l’expressionnisme allemand et l’estampe japonaise. Toutefois, Wang G. aurait pu tout aussi bien puiser son inspiration dans l’art folklorique chinois, bien qu’elle adopte une approche plus radicale du dessin à l’encre, comme nombre d’artistes qui expérimentent sur ce support dans les années 1980.
En 1986, le ministère français de la Culture invite Wang G. à participer à un programme d’échanges culturels international. C’est pour elle une révélation et une expérience riche en émotions, des visites au Louvre à sa propre exposition en passant par l’étude de nouvelles techniques d’impression comme la lithographie, à la fois à Lyon et à Aix-en-Provence. C’est à ce moment qu’elle a un aperçu un premier aperçu de ce qu’est la vie hors de Chine et que, paradoxalement, elle découvre différentes figures de la littérature et des arts chinois, disparues dans son pays en raison de la censure de la Révolution culturelle. Cela la conduit à s’essayer à une démarche plus expérimentale, en intégrant de nouvelles techniques et des installations artistiques. On pense notamment à son projet d’encre sur papier intitulé Nǐ tīng, nǐ kàn, nǐ cháng, nǐ wén, dàn bùyào wèn [Écoute, regarde, goûte, sens, mais ne pose pas de questions, 1993], qui incorpore des mots et des expressions chinoises signifiant « Pourquoi ? » et « Comprends-tu ? ». Ces mots calligraphiés sont parfois recouverts par d’autres, évoquant parfois un palimpseste là où ils deviennent illisibles. Son geste et son coup de pinceau gagnent en relâchement et en liberté, et le choix de ses sujets s’élargit : scènes aquatiques et maritimes, terrains montagneux, choix de formes naturelles – flore et oiseaux variés – expriment son affinité spirituelle pour la nature.
En 1998, elle fait de la conque le sujet de cent quarante peintures et dessins à l’encre, en en réalisant une œuvre par jour. Parmi les huit symboles de bon augure du bouddhisme, la conque est souvent associée à l’éveil spirituel, à l’introspection, à la vérité et à la force. Cette symbolique inspire profondément Wang G., à la fois dans sa démarche artistique et dans sa pratique de la méditation, qu’elle a découverte dans les années 1980 et qui lui a permis de comprendre et d’apprécier son art sous un nouveau jour. Parmi ses derniers tableaux, on citera Dújīng [Mantra, 2012] et Blessing (2015).
Wang G. participe à une exposition d’artistes femmes saluée, Half of the Sky : Contemporary Chinese Women Artists (1998), qui se tient au Frauenmuseum à Bonn (Allemagne). Elle entre ensuite en résidence au Museum of Art de l’Oregon avant d’enseigner au Pacific Northwest College of Art. À son retour des États-Unis, elle travaille au département des Arts d’impression de l’Académie des beaux-arts du Zhejiang avant de revenir s’installer définitivement aux États-Unis en 2001. Depuis, l’œuvre de Wang G. est largement exposée. L’artiste continue de recourir à des lavis d’aquarelle pour créer de vastes paysages évocateurs sur des panneaux, dans une démarche que l’on peut qualifier d’interprétation moderne du style shanshui (« montagne et eau ») de la peinture paysagère traditionnelle chinoise. Ces œuvres puisent souvent dans ses souvenirs du magnifique lac de l’Ouest à Hangzhou, dans la province du Zhejiang. Wang G. est particulièrement attirée par l’intense aquarelle bleu Winsor de Winsor & Newton, qu’elle applique méticuleusement afin de créer différentes densités de tons bleus, couchant son lavis directement sur du papier traditionnel Xuan. Cet ensemble d’œuvres récentes l’a conduite à organiser sa première exposition personnelle à New York, Wang Gongyi : Winsor Blue (2018). Wang G. a participé à la Biennale de Taipei en 2020.