Lee Lozano, Private Notes, 1969, © Photo : Kunstsammlung NRW Auflösung, © Kunstsammlung NRW Auflösung
I’M NOT A NICE GIRL! Eleanor Antin, Lee Lozano, Adrian Piper, Mierle Laderman Ukeles à la Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen à Düsseldorf met à l’honneur quatre artistes conceptuelles états-uniennes en regard des archives des galeristes allemand·e·s Dorothee et Konrad Fischer1. Célébrer aujourd’hui ces plasticiennes, c’est militer en faveur de la reconnaissance des artistes femmes par les institutions.
I’M NOT A NICE GIRL!2 témoigne de la volonté de Susanne Gaensheimer, directrice de la Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen depuis 2017, de promouvoir des artistes femmes en organisant des événements qui leur sont dédiés. Bien que ces dernières restent largement sous-représentées dans la collection, cette programmation compense des décennies de politiques d’acquisition discriminatoires.
Vue de l’exposition : I’M NOT A NICE GIRL! Eleanor Antin, Lee Lozano, Adrian Piper, Mierle Laderman Ukeles, Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen, 18 janvier – 28 juin 2020, © Photo : Achim Kukulies, © Kunstsammlung NRW Auflösung
L’exposition confronte un corpus d’œuvres pertinent à des documents inédits, qui attestent les contacts entre l’influent galeriste K. Fischer et des artistes conceptuelles, mais aussi Lucy R. Lippard3, afin de rendre compte des rapports de domination s’exerçant au sein la scène artistique en Europe et aux États-Unis, de la fin des années 1960 au début des années 1970. La prise de position féministe de la commissaire Isabelle Malz, au-delà de résonner avec l’actuelle lutte pour la parité, questionne l’histoire de l’art. La scénographie, conçue en étroite collaboration avec l’artiste Katrin Mayer (née en 1974), s’inscrit également dans une perspective féministe en privilégiant une disposition artistique et référencée des archives et des œuvres.
Eleanor Antin, Carving: A Traditional Sculpture, 1972, 148 tirages gélatino-argentiques et texte, 17,8 x 12,7 cm chacun, Art Institute of Chicago, Courtesy Eleanor Antin et Ronald Feldman Gallery, New York, © Photo : Kunstsammlung NRW Auflösung, © Kunstsammlung NRW Auflösung
Mierle Laderman Ukeles, Touch Sanitation Performance, 1979-1980, performance à l’échelle de la ville avec 8 500 travailleurs de l’assainissement dans les cinquante-neuf districts d’assainissement de la ville de New York, 15 mai 1980, Sweep 10, Queens 14, © Photo : Vincent Russo, Courtesy Mierle Laderman Ukeles et Ronald Feldman Gallery, New York, © Mierle Laderman Ukeles, © Kunstsammlung NRW Auflösung
Adrian Piper, Catalysis IV, 1970, documentation de performance, cinq tirages gélatino-argentiques, 4,6 x 40,6 cm chacun, Generali Foundation, Vienna, © Photo : Rosemary Mayer, © Adrian Piper Research Archive Foundation Berlin et Generali Foundation, © Kunstsammlung NRW Auflösung
Le parcours se divise en quatre salles, consacrées chacune à une plasticienne. Dans la pièce des archives de Dorothee et Konrad Fischer, le travail de Lee Lozano (1930-1999) – ses Private Books (1968-1972), certaines Language Pieces (1969) et une peinture (No Title, 1970) – explicite tout l’enjeu de l’accrochage, qui est « de savoir pourquoi ces artistes conceptuelles majeures, et leurs œuvres très intéressantes, ne sont pas présentes (dans la même mesure que leurs homologues masculins) dans nos collections et expositions à ce jour4 ». La visite se poursuit dans des salles du Bel Étage du K21 – l’espace de la Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen dédié à l’art contemporain –, où sont rassemblées les œuvres d’Eleanor Antin (née en 1935), de Mierle Laderman Ukeles (née en 1939) et d’Adrian Piper (née en 1948), principalement des films et des photographies de leurs performances, ainsi que de nombreux écrits et livres documentant les controverses et les revendications de l’époque. Engagées, ces artistes traitent depuis la fin des années 1960 des problématiques sociopolitiques telles que le combat contre les inégalités de genre et les discriminations raciales, l’identité et sa représentation, la critique institutionnelle ou encore la féminité.
Cette audacieuse rétrospective réussit, en convoquant un discours féministe, à révéler les mécanismes structurels qui ont amené à la dévalorisation des artistes femmes, et propose ainsi de réévaluer les pratiques curatoriales et les discours canoniques de l’histoire de l’art avec un regard contemporain.
I’M NOT A NICE GIRL! Eleanor Antin, Lee Lozano, Adrian Piper, Mierle Laderman Ukeles, du 18 janvier au 28 juin 2020, à la Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen (Düsseldorf, Allemagne).